Plus de 100 personnes intoxiquées par de la cocaïne frelatée à Buenos Aires

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11 février 2022

Au moins 24 personnes sont mortes à Buenos Aires la semaine dernière à cause de cocaïne frelatée qui contenait du carfentanil, un opioïde utilisé pour anesthésier les éléphants.

Casa rosada, Buenos Aires, Argentine

Buenos Aires a connu quelques jours d’incertitudes début février. La province de Buenos Aires a lancé une alerte épidémiologique le 2 février en raison d’une recrudescence d’overdoses au sein de sa population.

En l’espace de quelques jours, au moins 24 personnes sont mortes subitement à Buenos Aires pour avoir consommé de la cocaïne frelatée et 84 autres ont été hospitalisées, dont 20 en soins intensifs. Elles avaient toutes acheté de la cocaïne aux mêmes endroits.

Les hôpitaux ont su réagir rapidement en administrant de la naloxone à plusieurs patients, ce qui inverse les effets des opioïdes et ce qui a probablement évité d’autres victimes.

Avec la drogue encore en circulation et de nombreux autres consommateurs potentiels, la police a effectué des descentes là où les dealers vendaient cette cocaïne particulièrement mortelle. La semaine dernière, la police a saisi au moins 15 000 doses de cocaïne lors de ces raids.

Treize personnes ont été arrêtées dans le cadre de l’affaire de la cocaïne frelatée jusqu’à présent.

Parmi elles figure le Paraguayen Joaquín « El Paisa » Aquino, qui aurait vendu ce produit.

Le 4 février, la Direction nationale des migrations a ordonné l’expulsion définitive d’El Paisa d’Argentine au terme de la procédure judiciaire. El Paisa était un fugitif, son permis de séjour lui ayant été refusé et une interdiction d’entrée sur le territoire de 8 ans avait déjà été prononcée à son encontre.

Cinq mille doses de cocaïne ont été trouvées chez lui. Lui affirme que la police a placé elle-même les doses pour faire office de preuves.

Mais beaucoup de questions restent suspens dans cette soudaine intoxication de masse.

Le 10 février, les résultats de deux études indépendantes lancées par les autorités ont révélé la présence de carfentanil dans les échantillons de cocaïne saisis à Tres de Febrero, le quartier de Buenos Aires où les personnes ont acheté la cocaïne frelatée.

Des résultats antérieurs avaient exclu la présence de fentanyl, un opioïde que l’on peut retrouver mélangée à de l’héroïne ou utilisé en substitut.

Le carfentanil, un opioïde utilisé par les vétérinaires sur les animaux imposants

Le carfentanil est un opioïde, un dérivé du fentanyl 30 fois plus puissant que ce dernier selon les autorités argentines. Il est 10 000 fois plus puissant que la morphine.

Le carfentanil est un analgésique utilisé en médecine vétérinaire pour anesthésier de grands animaux comme les ours, les éléphants ou les rhinocéros. Le médicament fait partie de la liste des stupéfiants en Argentine depuis 2019.

Aux États-Unis, le fabricant a retiré sa demande d’autorisation de commercialisation auprès de la Food and Drug Administration. Plusieurs entreprises pharmaceutiques américaines cessent la commercialisation des opioïdes destinés aux animaux dans le contexte de la crise des opioïdes dans le pays « dans le but d’éviter la possibilité que les produits soient obtenus ou utilisés illégalement », a noté la FDA. Selon la FDA, le carfentanil est 100 fois plus puissant que le fentanyl.

On ne sait pas à ce jour si la cocaïne a été volontairement coupée pour augmenter la quantité de drogue à vendre. Une autre théorie au début de la crise était que des rivaux vendaient volontairement de la cocaïne frelatée sur les lieux de vente de leurs concurrents pour nuire à leur réputation.

Un avocat de familles plaignantes a fait tester des doses de cocaïne frelatée par des experts indépendants au cas où la police serait accusée de truquer les preuves. Les tests effectués sur des échantillons donnés par des proches des acheteurs ont révélé des traces de chlorhydrate de pipéridine, un autre dérivé du fentanyl.

Carlos Damin, chef du service de toxicologie de l’hôpital Fernández, a déclaré à La Nacion que cet opioïde n’étant pas utilisé en Argentine, il a probablement été importé ou cuisiné directement dans le pays.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.