Une médecin complotiste condamnée à de la prison en Allemagne pour avoir falsifié des certificats pendant la pandémie de Covid

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19 juin 2024

La praticienne a falsifié plus de 1000 attestations médicales, dispensant des patients de l’obligation de porter un masque. Après un procès long et très médiatisé, rythmé par les débordements de sympathisants d’un mouvement d’extrême droite, elle a été condamnée à une peine de prison.

Un certificat COVID numérique sur smartphone
Le médecin a falsifié plus de 1 000 certificats médicaux, dispensant ainsi les patients de l’obligation de porter un masque. | © European Union

Une praticienne de 67 ans a été condamnée ce lundi par le tribunal régional de Dresde à une peine d’emprisonnement de deux ans et huit mois, accompagnée d’une interdiction d’exercer la médecine de trois ans, pour avoir falsifié plus de 1000 certificats pendant la pandémie de Covid-19, comme le rapportent plusieurs médias allemands.

La femme en question, originaire de Moritzburg, dans la Saxe, aurait délivré des attestations médicales, sans examen préalable, dispensant des patients de l’obligation de porter un masque ou déclarant qu’ils ne pouvaient pas se faire vacciner pour raisons de santé. Le tribunal a également fixé une amende de 47.000 euros, correspondant à la somme totale qu’aurait encaissé l’accusée avec les faux certificats.

Des protestations et des interpellations de sympathisants avaient accompagné ce procès très médiatisé depuis novembre 2023. Quelques heures avant l’annonce du verdict, le juge a fait évacuer la salle après qu’une centaine de supporters de l’accusée se sont mis à chanter à tue-tête l’hymne national allemand. Le mois dernier, trois personnes avaient menacé et insulté le juge à sa sortie du tribunal.

La semaine dernière, la défense avait demandé l’acquittement de la praticienne qui aurait agi « en son âme et conscience » et « pour le bien de ses patients ». Selon les déclarations de la doctoresse, les masques de protection sont « nocifs pour l’organisme humain ». Elle a également qualifié les tests PCR et les vaccins contre le coronavirus de « poison ». Du point de vue de ses défenseurs, les mesures de protection établies par le gouvernement durant la pandémie étaient « anticonstitutionnelles ».

Ce n’est pas la première fois qu’un médecin est jugé pour avoir émis de faux certificats depuis la fin de la crise du Covid-19. En janvier 2023, un autre médecin allemand a été condamné à deux ans et neuf mois de prison pour avoir délivré illégalement à plus de 4 000 personnes – qu’il n’avait pour la plupart jamais rencontrées, ni examinées – des exemptions de port de masque pendant la pandémie de coronavirus. Un tribunal régional de la ville de Weinheim, dans le sud-ouest du pays, l’a condamné à une interdiction d’exercer pendant trois ans et à payer une amende de 28 000 euros, somme qu’il avait perçue pour délivrer les certificats médicaux.

Des nostalgiques du Reich sur le banc des accusés

Des sentences similaires ont été observées en Italie, en France, en Angleterre ou encore aux États-Unis. Si les motivations des accusés sont souvent d’ordre pécuniaire, de nombreux médias outre-Rhin affirment que l’accusée de Dresden est considérée comme faisant partie du mouvement d’extrême-droite des « citoyens du Reich » ou « Reichsbürgerbewegung » en allemand.

La mouvance des « Reichsbürger » a vu le jour dans les années 1980 avant de réellement se développer et de se structurer à partir des années 2010. Ses partisans, au nombre de 21.000 selon les services allemands de renseignement intérieur, sont des extrémistes de droite, des complotistes et des amateurs d’armes qui rejettent la légitimité de la République allemande moderne. Ils croient en la pérennité du Reich allemand d’avant la Première Guerre mondiale sous la forme d’une monarchie, comme l’explique l’AFP dans une récente dépêche.

Plusieurs groupes de sympathisants ont également décrété la création de leurs propres mini-États, certains refusant de payer des impôts et n’ayant pas de carte d’identité.

Une audience d’un groupe de « Reichsbürger » s’est ouverte aujourd’hui à Munich dans le cadre d’une série de trois procès prévus pour ce groupe extrémiste dont le démantèlement avait stupéfié le pays en 2022. Vingt-six suspects du groupuscule projetaient d’envahir la chambre des députés allemands à Berlin, pour y arrêter les élus et renverser violemment le gouvernement afin de négocier un nouvel ordre en Europe avec la Russie.

Le groupe a été découvert à la suite d’une vaste opération antiterroriste menée dans plusieurs États allemands et à l’étranger en décembre 2022. Des membres présumés du groupe sont déjà jugés séparément à Francfort et à Stuttgart.

Julie Carballo

Julie Carballo est correspondante pour Newsendip.

Auparavant, elle a notamment travaillé pour Le Figaro et au bureau de Rome pour l'AFP.