Le récent séquençage de l’ADN du café a entraîné de nombreuses découvertes et rend possible de futures innovations pour protéger la production de café.

Il existe 120 espèces de cafés différentes mais l’une d’entre elles, l’Arabica, occupe à elle-seule 60 % de la production de café dans le monde, sa saveur étant la plus appréciée. Pourtant, sa production est menacée par le dérèglement climatique et les maladies, mettant en danger un secteur dont les revenus de 125 millions de personnes dépendent d’après l’Organisation internationale du café.
Le caféier est donc l’objet d’inquiétudes et de recherches. La dernière en date, publiée le 15 avril dans la revue Nature, a utilisé le séquençage du génome, la cartographie détaillée de l’ADN, du café pour découvrir quel gène pourrait le rendre plus résistant aux maladies.
Parmi les 17 pays ayant participé à cette étude, deux était d’Amérique du Sud, les principaux producteurs de cafés mondiaux. Leur participation à cette recherche leur permettra peut-être d’éviter le sort du Mexique, le 9ème producteur mondial de café en 2011 jusqu’à que l’épidémie de rouille du caféier affecte sa plantation et contribue à la déforestation du pays.
C’est précisément ce champignon pathogène qui a motivé les recherches des scientifiques, qui souhaitent protéger l’Arabica de cette maladie en trouvant un gène résistant à cette maladie chez les espèces cousines comme le Coffea stenophylla ou le Robusta, plus robuste comme son nom le suggère mais dont le goût est moins subtil que celui de l’Arabica.
Du travail des chercheurs internationaux a résulté un séquençage, non pas du génome du café mais de son pangénome, c’est à dire la gamme complète des gènes de l’espèce, ce qui a permis l’équipe d’identifier 30 gènes, parmi 60 000, responsables de la résistance des feuilles de caféier à la maladie de la rouille.
Un café génétiquement modifié ?
Mais les gènes de la plante racontent bien plus de choses. L’équipe de scientifique a aussi identifié les gènes relatifs à l’arôme du café, rendant possible, si les tests suivants sont réussis, la manipulation génétique de graines pour les rendre encore plus savoureuses ainsi que pour un meilleur rendement des cultures.
De plus, l’identification de la saveur par les gènes permet d’anticiper le goût et la qualité de la production et épargne les années d’attente que nécessite la pousse de la plante. Cependant la culture d’OGM met en danger la biodiversité avec la pollution génétique.
Le café, plus vieux que les humains
Parmi les secrets livrés par la génétique de la plante, l’âge du café est établi et il est plus vieux que les humains !
La précédente estimation, très peu précise, se situait entre 50 000 ans et 1 million d’années. Il est aujourd’hui certain que le plant d’Arabica est né quand le Coffea eugenioides s’est croisé avec le Coffea canephora entre 350 000 et 600 000 ans avant notre ère. Pour rappel, les premiers Homo Sapiens sont apparus il y a 300 000 ans maximum.
Les origines géographiques du café ont également été dévoilées, l’Arabica viendrait des forêts d’Éthiopie et a d’abord été cultivé dans ce pays ainsi qu’au Yémen, avant de se répandre dans le monde entier. Le nom donné par le biologiste suédois Carl von Linné, qui croyait à une provenance de la péninsule arabique, était donc assez éloigné de la réalité.
Le dérèglement climatique menace le café
Les scientifiques, également inquiets du dérèglement climatique qui menace 50% des surfaces cultivables de l’Arabica, ont cherché chez les espèces sauvages cousines un gène permettant à la plantation de s’adapter. Les conditions de pousse optimales se situent autour de 22 degrés dans un climat tropical.
L’économie des pays de la ceinture du café est donc menacée par le réchauffement, déjà perceptible, du climat alors même que la demande de café devrait doubler d’ici 2050.
Avec toutes ces nouvelles informations, de nombreuses portes s’ouvrent pour l’industrie du café. Douglas Sila Domingues, co-auteur du papier, mène désormais une nouvelle étude avec l’Institut de Recherche pour le Développement de Marseille pour identifier les gènes donnant au caféier sauvage une résilience climatique et une résistance à la sécheresse pour les transmettre à l’Arabica.
Comment ? Domingues s’explique : « Grâce à la connaissance du génome, il est possible d’obtenir des informations qui nous permettent d’aller dans deux directions : le développement de variétés en orientant les croisements, c’est-à-dire en servant de référence pour nous guider dans les futurs croisements qui produiront de nouvelles variétés ; et des interventions plus directes, comme la modification d’un gène de manière spécifique. »