Une étude française a prouvé que certaines seringues peuvent effectivement extraire 7 doses des flacons du vaccin contre le Covid-19 de Pfizer. Mais l’approvisionnement mondial en matériel adéquat est insuffisant.
Alors que le monde tente d’inoculer le maximum de doses de vaccin contre le Covid-19, un groupe de pharmaciens du CHU de Rennes a étudié l’efficacité de différentes seringues et a démontré qu’une septième dose pouvait effectivement être extraite des flacons Pfizer. Mais le manque d’équipement adéquat peut limiter l’optimisation.
En janvier 2020, l’Agence européenne des médicaments a officiellement approuvé que six doses de vaccins contre le Covid-19 pouvaient être extraites de chaque flacon Pfizer/BioNTech au lieu de cinq. Chaque flacon contient en effet un peu plus que la quantité contractée, par précaution, pour s’assurer que toutes les doses soient effectivement livrées. En théorie, il y a environ 7,5 doses dans chaque flacon de 5 doses.
Mais Pfizer a commencé à réduire la livraison de vaccins, en avançant par exemple que l’Union européenne achetait un certain nombre de doses, et non des flacons. Alors que les pays membres souhaitaient obtenir davantage de doses de vaccins, cela a suscité de nombreux débats. Cependant, derrière la controverse et les négociations commerciales, le sujet a montré qu’un matériel adéquat était également essentiel pour des services de santé de qualité.
Et l’optimisation de chaque flacon est possible en utilisant des seringues spécifiques qui limiteraient le volume mort laissé à l’intérieur. Le volume laissé dans une seringue est en effet plus petit avec certains modèles, limitant le gaspillage du précieux liquide.
Pouvoir extraire 6 doses au lieu de 5 par flacon représenterait une augmentation de 17% du nombre de vaccins administrés à la population. Il s’agit déjà d’une amélioration considérable. Mais l’extraction d’une septième dose rendrait chaque flacon 29 % plus efficace.
Le Covid-19 a créé une pénurie mondiale de seringues à faible volume mort
En divers endroits, comme en Corée, en Espagne, en France, en Finlande ou en Belgique, les prestataires de soins de santé ont réalisé qu’une septième dose pouvait être extraite. Par exemple, deux infirmières espagnoles ont utilisé des aiguilles habituellement destinées à l’administration de l’insuline.
Un groupe de pharmaciens du CHU de Rennes a testé plusieurs configurations de seringues en mars et corrobore l’expérience sur le terrain. Publiés dans le Journal of Travel Medicine, les résultats ont montré que sur les 8 modèles testés, les seringues avec des aiguilles déjà serties, c’est à dire qu’il n’y a pas besoin d’assembler les deux éléments, offraient un volume mort plus faible, « permettant d’extraire jusqu’à sept doses d’un seul flacon ». Les seringues dont le volume mort était inférieur à 10 µL (0,01 mL) pouvaient extraire une septième dose. Mais ce type de matériel est devenu très demandé. En effet, entre 8 et 10 milliards de seringues sont nécessaires pour que le monde soit vacciné contre le Covid-19 alors que moins de 2 milliards de seringues sont habituellement utilisées pour la vaccination et l’immunisation chaque année.
En janvier, le Brésil a restreint ses exportations de seringues et d’aiguilles. En février, le ministre japonais de la santé, Norihisa Tamura, a admis que le pays serait incapable d’extraire la sixième dose, faute de seringues adéquates. Toutefois, en mars, le Japon a autorisé l’utilisation de seringues destinées aux injections d’insuline, bien qu’elles soient spécifiques aux injections sous-cutanées plutôt qu’intramusculaires.
Les États-Unis et l’Union européenne ont également signalé une pénurie de seringues. Selon le Wall Street Journal, une porte-parole du ministère américain de la santé et des services sociaux a reconnu en mai dernier que l’approvisionnement était limité. Le Dr François Lesourd, qui a participé à l’étude française, a déclaré à Newsendip que « nous disposons désormais des seringues adéquates pour extraire une septième dose en France. Mais dans le contexte d’une pénurie mondiale, nous sommes encore en train de tester l’efficacité de diverses seringues provenant de fournisseurs différents ».
La demande est forte et l’industrie tente d’augmenter sa production. Mais cela a tendance à se faire au détriment de la production habituelle. « En France, nous allons bientôt manquer d’aiguilles hypodermiques, celles que nous utilisons pour à peu près tout dans les hôpitaux, car tout le monde produit les aiguilles pour les vaccins contre le Covid-19″, avertit le Dr Lesourd.
Les perturbations causées par la pandémie ont de multiples conséquences collatérales. Au même titre que les masques chirurgicaux, les ventilateurs, l’oxygène médicale ou les surblouses, les seringues à faible volume mort sont en effet un nouvel exemple que le matériel médical sont des maillons d’une chaîne complexe dans l’efficacité des systèmes de santé.