Au Mexique, les cartels de la drogue recrutent aussi par les jeux en ligne

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4 novembre 2021

Au Mexique, trois enfants âgés de 11 à 14 ans ont été recrutés via un jeu en ligne pour travailler à 1 200 km de leur ville natale, probablement pour des trafiquants de drogue.

Free fire image du jeu
Free Fire, le jeu vidéo en ligne dans lequel trois jeunes Mexicains ont été recrutés par un cartel de la drogue | © Garena Free Fire

Le 20 octobre, lors d’un point mensuel sur la sécurité au Mexique avec le président Andrés Manuel Lopez Obrador, Ricardo Meijía Berdeja, le sous-secrétaire à la sécurité publique, a fait part d’une enquête sur la traite d’êtres humains ouvert à Oaxaca et lié au jeu vidéo Free Fire.

Le 9 octobre, trois mineurs ont été secourus à Santa Lucía del Camino, une ville de la région métropolitaine de Oaxaca, dans le sud du Mexique. Les trois jeunes garçons, âgés de 11 à 14 ans, avaient été portés disparus par leurs proches.

Ils étaient censés partir à Monterrey, dans le nord du Mexique, à 1 200 km de Oaxaca, et travailler vraisemblablement pour un cartel de la drogue.

Ils avaient été recrutés via le jeu vidéo en ligne Free Fire.

Ce jeu en ligne de type battle royale, similaire à Fortnite, peut être facilement téléchargé gratuitement sur un smartphone. Cinquante joueurs se battent les uns contre les autres pour devenir le dernier survivant sur une île déserte. En 2019, le jeu comptait plus de 80 millions d’utilisateurs dans le monde.

En août dernier, l’un des enfants est devenu ami avec un autre joueur appelé Rafael grâce au jeu. Ils ont étendu leur amitié sur Facebook. Quelques jours plus tard, le garçon a donné son numéro de téléphone au criminel pour qu’ils puissent également communiquer sur WhatsApp.

Rafael se fait appeler Moreno sur Facebook.

Il propose alors un travail à son nouvel ami : rester posté en haut d’une colline à Monterrey, vérifier les fréquences radio et alerter des personnes si la police arrive.

Pour ce travail, il serait payé 8 000 pesos (384 dollars) deux fois par mois. C’est presque 4 fois plus que le salaire minimum au Mexique.

Le garçon a ensuite mentionné la proposition et a invité deux de ses camarades de classe, qui ont accepté et voulaient faire le même travail et recevoir le même salaire.

Retrouvés par la police grâce à la fonction de localisation de Free Fire

Le 4 octobre, le garçon rencontre deux femmes dans une gare routière de Oaxaca et reçoit de l’argent en guise d’avance sur les frais de voyage.

Le 8 octobre, les trois enfants acceptent de faire le voyage le lendemain.

Le 9, ils quittent leur ville de campagne de Tlacolula de Matamoros pour Oaxaca et rencontrent l’une des femmes à la gare routière, à 40 km de leur point de départ. Avec un faux document d’identité, elle achète des billets et les amène dans un lieu situé à Santa Lucía del Camino.

Comme les garçons jouaient à Free Fire pendant ce temps et partageaient leur emplacement, la police a pu les retrouver, intervenir avant leur départ pour Monterrey et arrêter la femme, déjà accusée d’autres activités criminelles.

Tous deux basés à Singapour, ni Garena, le développeur et éditeur du jeu, ni SEA Ltd., le conglomérat propriétaire de Garena, n’ont communiqué sur le sujet.

Les conditions d’utilisation de Free Fire indiquent que « les joueurs n’ayant pas atteint l’âge de la majorité doivent demander l’autorisation de leurs parents avant de s’inscrire au jeu ». Mais le sous-secrétaire à la sécurité publique a expliqué qu’il n’y avait aucune restriction au téléchargement du jeu dans les app stores. De plus, il a souligné que le problème pouvait également se poser avec d’autres jeux comme Grand Theft Auto, Call of Duty ou des réseaux sociaux comme TikTok ou Instagram. Les trafiquants de drogue utiliseraient des noms d’utilisateur comme c4rt3l, sicari0s, pour cartel et sicarios, ou CJNG, CDN, qui sont les acronymes de Cártel Jalisco Nueva Generación et Cártel de Sinaloa.

Une enquête criminelle est ouverte à Oaxaca pour trafic d’êtres humains sous la forme d’exploitation par le travail.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.