Des adolescents du nord de la Norvège seront formés à la sécurité et à la préparation aux situations d’urgence, au cas où la Russie voisine attaquerait la région.
A partir de l’automne 2025, les adolescents de la région du Finnmark et du comté de Troms, situés au Nord de la Norvège, verront une nouvelle matière s’ajouter à leur emploi du temps : des cours de préparation à la guerre.
Ces mesures font partie de celles proposées par les gouverneurs des comtés de Troms et du Finnmark, la police et la défense norvégienne pour renforcer la préparation de la société en cas d’attaque de la Russie.
« Nous pensons que commencer par les jeunes est la meilleure façon d’aller de l’avant. Ils pourraient être une ressource très importante pour eux-mêmes, leurs familles et la communauté locale », a déclaré Elisabeth Aspaker, gouverneur du comté de Troms, au média norvégien NRK, « la formation permettra aux étudiants de mieux comprendre la situation de menace et leur apprendra à prendre soin d’eux-mêmes ».
Les jeunes apprendront également à aiguiser leur esprit critique face aux opérations d’influence menées par d’autres pays et aux « fake news « , explique Aspaker. « Nous pensons également que les jeunes devraient être en mesure de travailler dans différents types de fonctions de soutien au sein d’une municipalité, qui devra s’adapter et assumer toute une série de tâches en cas de crise », ajoute-t-elle.
Plusieurs raisons expliquent le lancement de ce projet pilote dans le Nord de la Norvège. Tout d’abord, la proximité de ces territoires avec la Russie – les deux pays partagent une frontière de près de 200 kilomètres dans l’Arctique – mais également, une population peu nombreuse et vieillissante. « La défense norvégienne est en cours de modernisation. Il est donc nécessaire de disposer d’une société civile encore plus solide qu’aujourd’hui », a précisé Jonas Gahr Store, Premier ministre norvégien, à NRK.
« Nordic Response »
En effet, en mars dernier, Jonas Gahr Store avait annoncé son intention d’augmenter les dépenses annuelles de défense du pays pour qu’elles atteignent 2% de son produit intérieur brut. La Norvège devait initialement atteindre cet objectif en 2026, mais elle y parviendra plus tôt que prévu, compte tenu de la menace potentielle que représente une Russie « dangereuse et imprévisible », selon les termes du Premier ministre.
Le budget de la défense pour 2024, qui devait initialement s’élever à environ 8,75 milliards de dollars, a été revu à la hausse dans le cadre d’un projet de loi de finances, déclarait alors M. Store, sans fournir de chiffre précis. En 2022, le budget de la défense de la Norvège représentait 1,57% du PIB du pays, selon l’OTAN.
L’invasion à grande échelle de l’Ukraine en février 2022, a suscité de nombreuses craintes parmi les pays scandinaves, voisins de la Russie.
Le Danemark a annoncé des plans similaires il y a quelques mois, déclarant qu’il augmenterait son budget défense de 5,9 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années.
En mars, un exercice de défense conjoint inédit de l’OTAN auquel avaient pris part plus de 20 000 soldats de 13 pays avait été lancé dans le nord de la Norvège, de la Suède et de la Finlande. L’entraînement, auparavant connu sous le nom de « Cold Response », se tenait tous les deux ans dans le nord de la Norvège, membre fondateur de l’OTAN. En reconnaissance de l’adhésion récente de la Finlande et de la Suède à l’alliance militaire occidentale, l’exercice a cette année changé de nom pour s’appeler pour la première fois « Nordic Response ».
« Nous devons être en mesure de riposter et d’arrêter quiconque tente de remettre en cause nos frontières, nos valeurs et notre démocratie. Compte tenu de la situation actuelle en matière de sécurité en Europe, cet exercice est extrêmement pertinent et plus important que jamais », avait alors déclaré le brigadier Tron Strand, commandant du centre d’opérations aériennes norvégien, dans un communiqué de l’OTAN.
« Chacun doit se préparer mentalement »
En janvier, des hauts responsables du gouvernement suédois et des forces de défense avaient explicitement averti la population que la guerre pourrait éclater à tout moment en Suède et que chaque Suédois devait se tenir prêt.
Carl-Oscar Bohlin, ministre de la défense civile, avait alors déclaré lors d’un discours officiel à un auditoire stupéfait que « la guerre pourrait arriver en Suède » et que la petite nation nordique de 10,4 millions d’habitants devait se préparer rapidement.
Le commandant en chef des forces militaires suédoises, Micael Bydén, a jeté de l’huile sur le feu en avertissant le même auditoire que « la guerre de la Russie contre l’Ukraine n’est qu’une étape, pas une fin en soi. Nous devons nous rendre compte de la gravité de la situation et chacun, individuellement, doit se préparer mentalement », a‑t-il ajouté.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, les autorités scandinaves et baltes ont constaté une recrudescence des cyberattaques et violations de leurs espaces aériens. Des aéroports norvégiens avaient temporairement fermés quelques heures après plusieurs observations d’un ou de drones supposément russes volant au-dessus la zone en 2022. Cette année, une vaste zone au-dessus de la mer Baltique a fait l’objet d’un certain nombre d’incidents de brouillages GPS, entraînant la perte par plusieurs avions de leurs signaux de navigation dérivés de satellites. L’Allemagne avait alors déclaré que la Russie était très probablement à l’origine de cette série de perturbations.
En février dernier lors d’une conférence de soutien à l’Ukraine, le président français, Emmanuel Macron, n’avait pas exclu la possibilité d’envoyer des troupes au sol, précisant que la France « fera tout ce qu’il faut pour que la Russie ne puisse pas gagner cette guerre ». Le chancelier allemand Olaf Scholz avait rapidement rejeté l’éventualité d’un envoi de troupes européennes sur le front ukrainien, évoquée par le Président français.
Plus récemment, s’adressant aux législateurs lors d’une séance de questions-réponses au Parlement allemand, Boris Pistorius, ministre de la Défense du pays, affirmait que l’Allemagne doit être « prête pour la guerre » d’ici 2029. « La Russie est passée à une économie de guerre et poursuit son réarmement. Il ne faut pas croire que Poutine s’arrêtera aux frontières de l’Ukraine s’il arrive à ses fins », avait-t-il déclaré.