Dark
Light

La Norvège confrontée à une pénurie de lait et une polémique sur le lait en poudre importé

3 minutes de lecture
29 janvier 2024

La Norvège est confrontée à une pénurie de lait suite à l’augmentation de la demande de yaourts norvégiens et à la limitation des quotas, entraînant une polémique sur un label pour les produits norvégiens contenant de la poudre de lait importée d’Allemagne.

vaches en Norvège
© Christian Ensby

La Norvège fait face à une pénurie de lait sans précédent en ce début d’année, perturbant l’industrie laitière alors que la principale société laitière, Tine, dépend des importations de lait en poudre étranger pour répondre à la demande du marché norvégien.

Cette pénurie, provoquée par des conditions climatiques défavorables et des erreurs d’appréciation de la demande, a suscité un débat autour du label « Nyt Norge » [Découvrez la Norvège], octroyée à des produits laitiers norvégiens qui contiennent désormais du lait en poudre allemand.

Tine, le plus grand producteur, distributeur et exportateur de produits laitiers en Norvège, est contraint de répondre tant bien que mal à la hausse de la demande de yaourts norvégiens.

Après une forte augmentation de la demande de lait pendant la pandémie de Covid-19, le marché s’est stabilisé, entraînant une baisse de la production en 2023 pour s’aligner sur la demande réduite. Marit Haugen, la présidente de Tine, a rapporté une baisse de 40 % des ventes de produits laitiers non aromatisés de l’entreprise au cours de la dernière décennie.

En conséquence, les quotas laitiers ont été abaissés en 2023 pour éviter la surproduction, mais l’entreprise n’avait pas anticipé l’augmentation parallèle de la demande de yaourts et de fromages fabriqués en Norvège.

Bien que les quotas aient été relevés, cela n’a pas suffi à répondre à la demande et empêché de nombreux agriculteurs à produire davantage, suscitant des critiques similaires envers l’entreprise pendant une pénurie de beurre en 2011.

De mauvaises récoltes durant l’été 2023, combinée à un déficit de 15 millions de litres de lait cet hiver, a encore aggravé la crise, amenant Tine à prévoir une pénurie de lait au cours des trois premiers mois de 2024.

En Norvège, gros pays consommateur de lait bien que la consommation ait diminué de moitié en 30 ans, la production de lait est priorisée sur tous les autres produits laitiers en temps de pénurie, préférant importer les fromages par exemple.

Face à cette pénurie, les entreprises laitières se sont tournées vers les importations de lait en poudre étranger, entraînant une réduction des droits de douane sur le lait en poudre pour soutenir le marché norvégien.

Cependant, cette stratégie a entraîné une restructuration de l’industrie, des pertes d’emplois et des fermetures d’installations. Pour se préparer à la compétitivité et à la croissance futures, Tine, ayant déjà cessé de produire du lait dans la municipalité d’Ålesund en 2023, a annoncé d’autres stratégies d’optimisation dans le sud de la Norvège, notamment la fermeture des installations de Sem et de Kristiansand d’ici à la fin de 2025.

La solution adoptée par Tine pour répondre à la demande croissante a suscité une nouvelle controverse, car certains produits contiennent désormais jusqu’à 3 % de lait en poudre allemand tout en portant le label « Nyt Norge ».

Les critiques estiment que ce label devrait être réservé aux produits entièrement norvégiens. Lene Westgaard-Halle, membre du parti conservateur norvégien d’opposition, qui a critiqué la politique agricole actuelle, et Ivar Pettersen, expert agricole, ont exprimé leurs préoccupations quant à l’utilisation trompeuse du label et à l’incapacité de Tine à réguler le marché du lait.

Bien que Tine rejette tout idée de faillite, elle insiste sur le fait qu’en trouvant des solutions à partir des importations pour couvrir les déséquilibres nationaux, l’entreprise continue à fournir aux Norvégiens les produits de qualité qu’ils méritent. Johnny Ødegård, responsable de la manutention des matières premières chez Tine, a par ailleurs souligné que le lait en poudre importé ne couvre que 1 % des besoins totaux en lait de la Norvège.

Cependant, la décision de maintenir le label « Nyt Norge » a été perçu par beaucoup comme une tentative délibérée d’induire les clients norvégiens en erreur. Afin de préserver sa réputation et d’apaiser les producteurs laitiers norvégiens indignés, Tine s’est récemment excusée d’avoir conservé le label et a publié une liste identifiant les produits contenant du lait en poudre importé.

Claire Rhea

Claire est journaliste pour Newsendip.

Elle a grandi à Londres et possède la double nationalité américaine et française. Elle est diplômée en sciences politiques et économie de l'Université McGill à Montréal. Elle a également vécu en Italie.