Le ministère japonais de l’intérieur et des communications a annoncé le 25 juin qu’il allait revoir les règles relatives aux impôts locaux, basés sur un système de dons à la ville de son choix.
Le ministre japonais de l’intérieur et des communications a déclaré ce mardi une interdiction aux gouvernements locaux de solliciter des dons pour les taxes locales par le biais de sites web intermédiaires qui accordent des points de récompense aux utilisateurs.
Les programmes d’impôts locaux, ou furusato nōzei comme on les appelle en japonais, permettent aux contribuables de faire des dons aux municipalités. En retour, ils bénéficient de déductions sur d’autres impôts comme l’impôt sur le revenu.
Mais depuis plusieurs années, des sites intermédiaires sont apparus pour la gestion des dons aux municipalités.
Ces sites de plus en plus utilisés, permettent aux villes de sous-traiter la collecte des dons, et aux utilisateurs d’effectuer leur don par le biais de procédures simples. Afin de garder les utilisateurs dans la boucle, les sites ont mené des campagnes de communication agressives et créé un système de cashback via l’attribution de points.
Les quatre principaux sites intermédiaires – Rakuten Furusato Tax Payment, Satofuru, Furusato Choice et Furu-Navi – représentent plus de 90 % des parts de marché. Rakuten, le plus important, aurait connu une croissance rapide grâce aux échanges de points.
En réponse à l’intensification de la concurrence entre ces sites, le ministère a annoncé que les dons collectés par ces intermédiaires ne seront alors plus déductibles dans le cadre du système de taxe.
La furusato nōzei
Étant donné que les points des sites intermédiaires sont censés être partiellement financés par les commissions versées par les gouvernements locaux aux exploitants des sites, l’interdiction des points devrait entraîner une augmentation relative des revenus de ces gouvernements, a déclaré un membre du ministère au média Nikkei.
Le Japon a introduit la furusato nōzei (« taxe sur la ville natale ») en 2008, constatant que près de 92 % de la population japonaise vivait dans des villes. Lorsque les jeunes s’installent dans les zones urbaines et commencent leur carrière, leurs contributions fiscales vont à leur ville d’adoption, laissant les campagnes avec une infrastructure et une population vieillissantes – dont beaucoup sont des retraités non imposables.
Deux facteurs clés rendent le programme de « taxes-dons » furusato nōzei unique : d’une part, les contribuables n’ont pas besoin de faire un don à leur ville natale – n’importe quelle ville participante fait l’affaire, et d’autre part, les dons sont souvent récompensés par un cadeau spécial de remerciement.
Ainsi, en fonction du montant donné, les contribuables peuvent s’attendre à recevoir en retour une bouteille de saké japonais fermenté localement, des bons d’achat pour des attractions locales, des filets de steak Wagyu ou même des sacs d’oignons.
Un million de yens pour devenir chef de gare
Et il semblerait bien que ce système créé pour sauver les petits villages désertés de la banqueroute ait un peu dérapé.
En mai dernier, les 23 municipalités de Tokyo annonçaient vouloir diversifier leurs offres dans le cadre du programme de dons, en privilégiant les cadeaux « d’expérience pratique » qui mettent en valeur les attractions locales. D’abord réticentes à participer à la course entre les municipalités locales pour attirer les contribuables avec des cadeaux, les circonscriptions de Tokyo adoptent désormais le programme alors que certaines voient leurs recettes fiscales diminuer.
En effet, cet impôt local sous forme de dons non payés sur le lieu de résidence des contribuables japonais, a tendance à créer un système fiscal inégalitaire entre les villes.
Ainsi, la redistribution des recettes fiscales pénalise par exemple le quartier de Setagaya, à Tokyo, au profit de villages. En 2024, cette partie de la ville devrait ainsi enregistrer une perte de recettes fiscales de près de 70 millions de dollars en raison des déductions opérées dans le cadre du système d’imposition de la ville d’origine, rapporte le Wall Street Journal.
La circonscription de Toshima, qui utilise les animés et les mangas pour promouvoir la région, a récemment introduit des billets pour un événement mensuel de cosplay organisé dans la circonscription comme option de cadeau pour les donateurs contribuant au moins 20 000 yens (115 euros).
Pour un don de 530 000 yens (3 100 euros) ou plus, les donateurs peuvent bénéficier d’un forfait comprenant un maquillage professionnel et des costumes de cosplay, une pratique consistant à incarner un personnage de manga, de film d’animation ou de jeu vidéo. « À l’avenir, nous aimerions réduire le prix unitaire des dons afin que le service puisse être utilisé par un plus grand nombre de personnes », a déclaré un responsable du service au Japan Times.
En octobre dernier, dans le cadre d’un partenariat unique avec East Japan Railway, le quartier de Shinjuku a offert une expérience de chef de gare d’une journée à la gare de Shinjuku, l’une des gares les plus fréquentées du Japon, pour un don d’au moins 1 000 000 de yens (près de 6 000 euros).