Polémique en République tchèque sur un document à propos de la responsabilité russe dans les explosions de Vrbětice

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2 février 2022

La police tchèque a découvert qu’une note confidentielle envoyée au président tchèque détaillant la responsabilité de la Russie dans les explosions de Vrbětice avait été supprimé. Le bureau du président nie toute malversation.

Miloš Zeman (à gauche) et Vladimir Poutine (à droite) lors d'une visite officielle du Président de la République tchèque en Russie en 2017
Miloš Zeman (à gauche) et Vladimir Poutine (à droite) lors d’une visite officielle du Président de la République tchèque en Russie en 2017 | © Bureau du Président de la République tchèque

Le Centre national contre le crime organisé s’est rendu au bureau du président tchèque le 21 janvier pour mettre la main sur un document confidentiel rédigé par le Service d’information de sécurité (BIS), une agence de renseignement intérieur tchèque.

Ils voulaient vérifier s’il y avait des empreintes digitales ou de l’ADN permettant de remonter jusqu’à une personne ayant eu accès à ce document confidentiel sans autorisation. La note hautement sensible serait restée plusieurs jours dans le bureau du président Miloš Zeman avant que celui-ci ne la lise.

Mais les forces de l’ordre ont découvert que la note confidentielle avait été détruite, ont rapporté la radio tchèque Radiožurnál et le magazine d’information Respekt le 29 janvier. Le personnel a d’abord déclaré qu’il s’agissait d’une erreur.

La note expliquait que deux agents du GRU, l’agence de renseignement militaire étrangère russe, étaient probablement responsables des explosions à Vrbětice.

L’enquête tchèque sur Vrbětice toujours en cours

En 2014, deux entrepôts de munitions à Vrbětice ont mystérieusement explosé. Vrbětice est une petite ville proche de la frontière slovaque où des armes était supposément dédiées aux troupes ukrainiennes combattant l’armée russe.

Peu après avoir reçu le document en avril 2021, la République tchèque a annoncé qu’elle soupçonnait un service de renseignement militaire russe d’avoir planifié les explosions. Cette annonce a entraîné des tensions politiques entre Prague et Moscou, et notamment à des expulsions mutuelles de diplomates.

Miloš Zeman avait initialement suggéré que les explosions étaient un accident, mettant en doute l’implication de la Russie. Cela a suscité des manifestations à Prague qui accusaient M. Zeman d’être pro-russe.

Le Centre national contre le crime organisé et l’agence tchèque de contre-espionnage continuent toutefois d’enquêter sur les explosions. Ils soupçonnent par exemple un citoyen tchèque qui aurait pu avoir aidé les agents du GRU.

La République tchèque collabore également avec l’Ukraine et la Bulgarie où d’autres dépôts de munitions qui ont explosé seraient liés aux explosions de Vrbětice. Le chef de la police a également été en contact avec le directeur du FBI au sujet de cette affaire.

Le bureau du Président affirme que le document a été détruit suivant le protocole

Le bureau du Président, le Hrad pour Château en tchèque, n’a pas nié avoir détruit le document. Cependant, il rejette toute erreur ou toute malversation, affirmant au contraire avoir suivi les procédures légales et rejetant la responsabilité d’une erreur si elle existe sur le BIS.

« Du 29 novembre au 1er décembre, plus de 500 documents classifiés jetés ont été détruits », a expliqué le bureau le 29 janvier.

Le 31 janvier, le Hrad a ajouté qu”  »aucune personne non autorisée n’a eu connaissance du contenu du document et la protection des informations classifiées n’a pas été mise en danger ».

Il affirme que le document a été détruit en suivant le niveau de confidentialité que le BIS lui a donné et a suivi la procédure de destruction habituelle.

Il note que le document « a été livré au Château par le BIS dans un désordre flagrant » car il a été remis « d’une manière inhabituelle, en dehors des heures de travail et en contradiction avec la législation en vigueur ».

Dans sa note, le Hrad s’interroge sur les raisons des fuites dans les médias, sous-entend un amateurisme suspect du service d’information de sécurité, et se demande ouvertement pourquoi la police ne s’intéresse au document que maintenant, alors qu’il a déjà été détruit.

Mais le BIS a nié tout désordre au sujet de ce document dûment remis et accepté sans problème par le Château. Elle a expliqué dans une déclaration qu’une erreur administrative mineure avait été corrigée dans les heures qui avaient suivi, ce qui n’avait pas affecté la sensibilité du document.

Une commission parlementaire de sécurité doit examiner l’affaire avec toutes les informations le 3 février.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.