Le maire français et chef de parti du Mouvement démocrate François Bayrou aidera la dirigeante du Rassemblement national Marine Le Pen à se présenter à l’élection présidentielle pour « sauver la démocratie ». Les sondages d’opinion placent régulièrement Mme Le Pen en deuxième position pour l’élection présidentielle française de 2022, mais elle pourrait ne pas être éligible.
François Bayrou a annoncé le 27 février sur la télévision française LCI qu’il parrainerait Marine Le Pen pour l’aider à devenir candidate à la prochaine élection présidentielle prévue en avril 2022.
Bayrou est le leader du MODEM, pour Mouvement démocrate, un parti politique qu’il a créé et positionné au centre du spectre politique gauche-droite. Proche soutien de l’actuel président Emmanuel Macron, il cependant décidé de parrainer Marine Le Pen, l’adversaire potentiellement la plus importante de M. Macron dans la course à la présidence.
Marine Le Pen est la dirigeante du Rassemblement national, un parti politique nationaliste d’extrême droite. Elle apparaît souvent en deuxième position derrière Emmanuel Macron, avec trois autres candidats, dans les sondages d’opinion en vue de la prochaine élection présidentielle. Lors de la dernière élection en 2017, elle s’est qualifiée pour le second tour avec Emmanuel Macron, mais a perdu contre le président actuel avec 34 % des voix.
Mais elle pourrait ne pas être en mesure de se présenter aux prochaines élections. Ce serait la première fois depuis 1981 que son parti, anciennement dirigé par son père Jean-Marie Le Pen, qui a perdu la course à la présidence au second tour contre Jacques Chirac en 2002, ne propose pas de candidat à l’élection présidentielle.
Beaucoup de parrainages d’élus
Les présidents français sont élus au suffrage universel direct lors d’un scrutin à deux tours. Les deux candidats qui ont recueilli le plus de voix au premier tour espèrent être élus au second (être élu à la majorité absolue au premier tour est possible mais ne s’est jamais produit depuis que l’élection est devenue un vote populaire direct en 1962).
Mais pour être éligible à la présidence française, les candidats doivent recueillir au moins 500 signatures de 42 000 élus français, ce qui inclut les 36 000 maires des villes du pays.
Marine Le Pen et Éric Zemmour, un autre candidat nationaliste potentiel crédité d’environ 15 % des bulletins de vote pour le premier tour dans les sondages, doivent encore recueillir au moins 17 % des 500 signatures requises, ou « parrainages ».
La date limite pour les recueillir est le 4 mars, soit dans quatre jours.
La semaine dernière, Mme Le Pen a déclaré qu’elle avait interrompu sa campagne politique afin de recueillir suffisamment de signatures.
Par conséquent, M. Bayrou, en tant que maire de Pau, une ville de 76 000 habitants située dans le sud-ouest de la France, a décidé d’en donner une à Marine Le Pen. Mais avec un « petit pincement au cœur » pour l’ancien candidat à la présidence qui avait terminé troisième en 2007.
Les adversaires politiques de l’extrême droite préféreraient généralement que ces candidats ne se présentent pas du tout à l’élection présidentielle.
Mais M. Bayrou a justifié sa décision par le fait qu’il n’acceptait pas que « le président de la République française soit élu dans une élection où les principaux candidats sont exclus » d’y participer. « L’élection présidentielle serait en danger si les principaux candidats qui défendent des idées [qui sont en progression] ne pouvaient pas se présenter, même si je trouve ces idées insupportables ».
Il n’est pas le seul homme politique à soutenir un candidat opposé à ses opinions politiques. Le maire de Cannes, David Lisnard, du parti de la droite républicaine, a donné sa signature au populiste de gauche Jean-Luc Mélenchon la semaine dernière. Ce dernier a désormais recueilli suffisamment de signatures pour se présenter.
Une critique récurrente de la part d’aspirants à la présidence
Le processus de parrainage par des élus pour valider une candidature à l’élection présidentielle existe en France depuis 1962.
Le nombre de signataires requis est passé à 500 en 1976 et est devenu public pour l’élection présidentielle de 1981. De 1981 à 2012, 500 signatures étaient rendues publiques de manière aléatoire sur l’ensemble des signatures recueillies par les candidats.
Un élu ne peut parrainer qu’un seul candidat mais plusieurs candidats peuvent recueillir plus de 500 parrainages. C’est le cas d’Emmanuel Macron, qui a recueilli plus de 1 500 signatures alors qu’il n’a pas encore officiellement déclaré sa candidature.
Depuis la dernière élection présidentielle de 2017, toutes les signatures sont rendues publiques.
La révélation publique des signataires a été critiquée par les aspirants candidats qui luttent pour atteindre le seuil avant chaque élection présidentielle.
Et comme les élus locaux français font de plus en plus l’objet de critiques virulentes et de menaces au sein d’une société fragmentée, nombreux sont ceux qui hésitent à soutenir un candidat. Car signer un parrainage est largement perçu comme un soutien aux idées du candidat.
Laisser Le Pen se présenter « pour sauver la démocratie »
M. Bayrou a récemment lancé une plateforme centralisant 380 signatures disponibles pour « sauver la démocratie, mais notre signature ne vaut pas soutien ».
Depuis son apogée en 2002 avec 17 815 signatures de 42 000 officiels, le nombre de parrainages n’a cessé de diminuer. Alors qu’il reste moins d’une semaine aux candidats potentiels pour valider leur candidature, seules 10 265 personnes, soit 1 sur 4, ont soutenu un candidat. Cela représente une baisse de 30 % par rapport à 2017.
Les partis politiques historiquement forts obtiennent généralement le nombre de signatures requis. Mais de plus petits candidats indépendants comme Jean Lassalle, qui incarne une image provinciale populaire bien qu’il n’ait recueilli que 1,2% des voix en 2017, ont également pu réunir 500 soutiens pour 2022.
Mise à jour le 1er mars : Marine Le Pen et Éric Zemmour ont déclaré suffisamment de signatures pour se présenter à la présidentielle. François Bayrou n’a pas encore donné son parrainage.
Traduit de l’anglais