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Aux Pays-Bas, la moitié des victimes de traite d’être humains sont à nouveau victimes de crimes

3 minutes de lecture
7 décembre 2021

Les victimes de la traite des êtres humains semblent se retrouver dans un cycle de violence et d’insécurité, alerte un rapport néerlandais. En 2020, la pandémie de COVID-19 a rendu l’exploitation sexuelle moins visible tandis qu’elle a mis en lumière le travail forcé de travailleurs illégaux qui ont perdu leur emploi.

Illustration traite des êtres humains aux Pays-Bas
Aux Pays-Bas, 76 % des victimes de la traite des êtres humains sont des femmes et deux tiers des cas liés à des mineurs concernent l’exploitation sexuelle | © Gerd Altmann

Le rapport 2016–2020 Victim Monitor for Human Trafficking in the Netherlands montre que cinquante pour cent des victimes de la traite des êtres humains aux Pays-Bas redeviennent victimes d’un crime dans les sept années qui suivent.

Le document est publié par le rapporteur national sur la traite des êtres humains et les violences sexuelles contre les enfants, une équipe indépendante nommée pour un mandat de quatre ans qui soumet des études et des suggestions au gouvernement néerlandais.

Les recherches montrent que 45 % des victimes de la traite des êtres humains sont à nouveau victimes de la criminalité dans les cinq années suivantes. Ce chiffre passe à 50 % après 7 ans. Les crimes sont souvent graves et peuvent impliquer des agressions, des menaces, des violences sexuelles ou à nouveau leur exploitation.

Dans les cinq années qui suivent la traite d’un être humain, 33 % des victimes subissent une infraction envers leurs biens, ce qui inclut vol, cambriolage, vol à l’arraché, l’extorsion, le détournement de fonds ou arnaque. Vingt-cinq pour cent sont victimes d’abus, 8 % sont à nouveau victimes de la traite des êtres humains et 8 % sont victimes de délits sexuels.

« Les victimes semblent se retrouver dans un cycle d’insécurité et de violence dont il est difficile de sortir », souligne le rapport.

La situation est d’autant plus vraie lorsqu’une personne a été victime de la traite d’êtres humains durant l’enfance. Elle subit alors les conséquences d’une expérience traumatisante sur le long terme.

COVID-19 a rendu les personnes vulnérables encore plus isolées

Environ 1 000 personnes sont déclarées victimes de la traite d’êtres humains chaque année aux Pays-Bas. Mais il pourrait y avoir cinq fois plus de victimes dans le pays selon certaines estimations.

Les victimes font souvent partie d’une population vulnérable au contexte social difficile, particulièrement les mineurs ou les migrants. Les victimes et les agresseurs sont souvent jeunes, et parfois, les personnes peuvent être à la fois victimes et agresseurs. Soixante-seize pour cent des victimes sont des femmes et deux tiers des cas liés aux mineurs concernent l’exploitation sexuelle.

En effet, la forme la plus courante de traite des êtres humains aux Pays-Bas est l’exploitation sexuelle (75 % des cas signalés), la moitié des victimes étant néerlandaises et l’autre moitié venant de l’étranger. En 2020, le nombre de cas signalés a diminué pour la troisième année consécutive. Mais comme beaucoup de cas passent inaperçus, le rapporteur craint que la pandémie de COVID-19 n’ait aggravé la situation car la prostitution est devenue moins visible et les contrôles de police ont diminué en 2020.

Et en 2020, l’exploitation du travail était de loin la forme de traite d’êtres humains la plus signalée. En effet, le nombre de victimes d’exploitation par le travail signalées a augmenté de 72 % en 2020 par rapport aux 449 cas en 2019.

Plus de la moitié des victimes d’exploitation par le travail provenaient de Pologne, de Hongrie ou de Bulgarie. Le rapport souligne que la pandémie de COVID-19 a mis en lumière certaines situations qui seraient restées autrement cachées. En effet, c’est lorsque les travailleurs illégaux ont perdu leur emploi, leur salaire ou leur maison à cause de la pandémie qu’ils ont cherché du soutien et de l’aide auprès des organisations.

Les municipalités devraient agir plus rapidement

Le gouvernement néerlandais est encore « insuffisamment performant » en matière de prévention, de protection et d’assistance concernant la traite des êtres humains, explique le rapporteur national.

Le rapport met particulièrement en évidence le rôle des municipalités. Les municipalités sont les organes administratifs les plus proches de la population et le rapport suggère que les actions locales telles que la fourniture d’abris soient plus rapides et renforcées avec le soutien des ministères de la justice et de la santé.

La recommandation urgente du rapporteur est de « permettre aux municipalités et aux professionnels de fournir une assistance appropriée à toutes les victimes présumées de la traite des êtres humains sur une base durable et sur le long terme ».

L’année prochaine, les municipalités recevront 1,3 milliard d’euros supplémentaires pour combler les manques d’aide à la jeunesse.

En juin, le rapport des États-Unis sur la traite des personnes a estimé que les Pays-Bas faisaient des efforts suffisants pour réduire la traite des êtres humains, à l’exception des îles de Curaçao, Saint-Martin ou Aruba qui font partie du Royaume des Pays-Bas.

Mais le pays était dans une bien meilleure position que l’Irlande, qui a été placée sur la liste de surveillance de la traite des êtres humains des États-Unis.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.