Un hôtel situé dans le parc protégé des Chocolate Hills aux Philippines a été contraint de fermer ses portes parce qu’il opérait dans une zone protégée sans le certificat environnemental nécessaire. Une faille dans le système qui fut révélée suite avec une vidéo postée par un influenceur.

Le mercredi 6 mars, un vlogueur a publié une vidéo d’un complexe touristique situé au milieu des Chocolate Hills, dans la municipalité de Sabayan, dans la province de Bohol. La vidéo, qui montre une piscine, des toboggans et des bungalows, a été visionnée 17 millions de fois et a provoqué l’indignation sur les réseaux sociaux à cause de l’altération de ce trésor national.
Au lieu de générer une publicité positive pour l’hôtel la vidéo a déclenché une enquête sur ses activités. Elle a conclu que le complexe hôtelier fonctionnait depuis des mois sans certificat de conformité environnementale et effectuait une extraction illégale de l’eau.
La construction du complexe au pied des Chocolate Hills soulève des questions sur la protection des ressources naturelles. Après avoir visité la zone protégée jeudi dernier, la secrétaire d’État à l’environnement, Maria Antonia Yulo Loyzaga, a déclaré aux médias que la violation des règlementations pourrait avoir un impact sur le statut de l’île de Bohol en tant que premier géoparc mondial de l’UNESCO dans le pays.
Elle a ajouté que ces structures pourraient être démolies pour réparer les dégâts et réhabiliter la zone naturelle des Chocolate Hills.
L’avenir du Captain’s Peak and Garden Resort en question
En 2018, le gouvernement local de Sabayan avait accordé au complexe une licence commerciale qui a été renouvelée en janvier 2024, révélant un manque de surveillance qui a mis en péril le trésor national.
La révélation accidentelle de l’exploitation de cette zone protégée par le Captain’s Peak and Garden Resort a conduit le gouvernement local de Sabayan à annuler le permis commercial le 14 mars. Le ministère de l’environnement et des ressources naturelles (DENR) a émis un ordre de cessation des activités le 19 mars.
Ainsi, le Captain’s Peak and Garden Resort a été contraint d’annoncer sa fermeture temporaire sur les réseaux sociaux. Il risque aussi une amende pouvant aller jusqu’à 5 millions de pesos philippins (88 000 euros).
Mais la controverse n’est pas encore résolue : la sénatrice Nancy Binay a déposé une résolution demandant une enquête sur les structures situées à proximité des Chocolate Hills.
Elle a demandé au DENR, au Conseil de gestion des aires protégées (PAMB), au Bureau de gestion environnementale de Bohol (BEMO), au Bureau provincial de l’environnement et des ressources naturelles ainsi qu’aux autorités locales d’expliquer pourquoi des permis de construire ont été accordés dans une zone protégée.
Une enquête locale a été lancée pour déterminer la culpabilité des fonctionnaires locaux dans cette affaire.
Un trésor national pas si protégé que ça ?
Les Philippines regorgent de merveilles naturelles faisant le bonheur des touristes. S’étendant sur plus de 7 000 îles, Les Philippines sont considérées comme l’un de ces pays mégadivers avec une grande biodiversité d’espèces endémiques. Elles comptent plus de 200 zones protégées, dont trois sont inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Attirant plus d’un million de visiteurs par an, les Chocolate Hills sont l’une des attractions touristiques les plus prisées des Philippines. Il s’agit d’une formation géologique sur l’île de Bohol composée de plus de 1 200 collines réparties sur une superficie de plus de 50 kilomètres carrés. La végétation verdoyante qui les recouvre prend une couleur chocolat pendant la saison sèche, d’où leur nom.
Ces collines emblématiques ont été déclarées Monument géologique national et Paysage protégé par le pays en 1997, ce qui signifie que les autorités sont tenues par la loi de « protéger et maintenir sa beauté naturelle et de mettre en place des mécanismes de restriction en cas d’exploitation inappropriée ». Elles figurent également sur la liste des candidats pour la reconnaissance du site au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Néanmoins, la révélation d’un complexe fonctionnant sans le permis requis met en évidence un manque de surveillance qui a permis une violation de ces protections. L’enquête a révélé que l’hôtel procédait à des extractions illégales d’eau issues de sources profondes sans avoir obtenu le droit de le faire.
Dans une déclaration conjointe, le DENR, le ministère de l’intérieur et des collectivités locales (DILG) et le ministère du tourisme (DOT) ont souligné leur objectif de préserver le patrimoine naturel et de garantir un tourisme responsable en « renforçant les réglementations et les mécanismes de contrôle » ainsi qu’en « appliquant une protection de l’environnement fondée sur des données probantes ».
Le secrétaire du DILG, Benhur Abalos, a également visité le site et a suggéré que l’organisation du PAMB soit examinée en vue d’un « contrôle et d’un équilibre ». En effet, le conseil des zones protégées avait même autorisé le complexe hôtelier d’utiliser « au moins 20 % des collines ».