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En République tchèque, la Cour suprême donne raison au e‑commerce quand les magasins restent fermés

4 minutes de lecture
15 juillet 2021

En République tchèque, la livraison des produits achetés dans des boutiques en ligne était interdite pendant que les magasins traditionnels devaient rester fermés pendant les jours fériés. Mais la Cour suprême a tranché en faveur d’Alza.cz, un géant du e‑commerce.

Terminaux de paiement dans un showroom Alza.cz
Terminaux de paiement dans un showroom Alza.cz | Alza.cz

Depuis 2016, la loi sur les heures d’ouverture des commerces de détail et les grossistes interdit à certains magasins de vendre des produits pendant plusieurs jours fériés en République tchèque.

Pour permettre aux personnes de profiter de ce temps libre en famille, les magasins ne peuvent pas être ouverts la veille du Nouvel An, le lundi de Pâques, ou du 24 décembre après-midi au 27 décembre par exemple. Certains endroits sont toutefois exemptés de cette interdiction, comme les magasins de moins de 200 mètres carrés, les stations-service ou les établissements de santé.

L’autorité d’inspection du commerce tchèque, un organisme relevant du ministère de l’industrie et du commerce, peut imposer une amende allant jusqu’à 1 000 000 couronnes tchèques (46 000 dollars) aux contrevenants qu’elle contrôle. Et la CTIA ciblait particulièrement un gros acteur du e‑commerce tchèque : Alza.cz.

Avec un chiffre d’affaires de plus de 1,14 milliard d’euros en 2020 selon le site web de l’entreprise, Alza.cz est l’un des plus gros sites marchands d’Europe centrale. Cette entreprise semblable à Amazon possède également une quarantaine de magasins physiques en République tchèque, ainsi que plus de 600 emplacements pour les Alzabox – où les clients peuvent récupérer les articles achetés – répartis dans tout le pays. Elle s’est également développée avec des points de vente ou des magasins d’exposition en Slovaquie, en Autriche ou en Hongrie.

Les magasins Alza restent ouverts pendant les jours d’interdiction, vendant des produits malgré les contrôles du CTIA. Et en septembre 2017, pendant la fête nationale tchèque, une inspection a conduit à une amende de 100 000 couronnes (4 500 dollars). Sauf qu’Alza.cz a intenté un procès, qui est allé jusqu’à la Cour suprême tchèque.

Magasin Alza.cz à Pilsen
Magasin Alza.cz à Pilsen, où un inspecteur a estimé que le magasin avait violé l’interdiction d’exercer pendant la fête nationale tchèque | Alza.cz

Alza.cz considère que les magasins agissent comme des distributeurs de marchandises

Le 28 septembre 2017, un inspecteur s’est présenté dans l’un des magasins d’électronique Alza ouverts à Pilsen et a demandé une souris d’ordinateur sans fil.

Cependant, en raison de la loi sur les heures d’ouverture qui interdit la vente directe le jour de la fête nationale tchèque, l’employé a proposé comme alternative d’acheter le produit en ligne depuis un ordinateur portable dédié aux clients dans le magasin.

L’inspecteur a alors commandé le produit sur le site Internet, a choisi le magasin comme lieu de retrait, a reçu un SMS de confirmation et s’est rendu à un distributeur automatique de paiement. Après le traitement du paiement en espèces, l’employé a ensuite remis le produit à l’inspecteur sur la base du reçu. L’inspecteur se trouvait physiquement à l’intérieur du magasin pendant tout le processus d’achat.

La CTIA a alors considéré qu’Alza.cz avait violé le règlement, tandis que l’entreprise a estimé qu’elle avait respecté la loi. En effet, Alza.cz fait valoir que ces jours-là, les magasins ne sont que des distributeurs de marchandises. Pour le CTIA cependant, l’interdiction devrait s’appliquer à toutes les étapes d’un cycle de vente, car la livraison d’un produit fait partie du processus de vente, qui ne serait pas complet sans elle.

Le cœur du litige réside ainsi autour de la question de ce qu’est véritablement un acte d’achat.

Le tribunal de Pilsen a interdit à Alza.cz d’ouvrir ses magasins, mettant ainsi les détaillants en ligne au même niveau que les magasins traditionnels. Mais cinq ans après le procès, la Cour administrative suprême tchèque a fini par donner raison au e‑commerçant.

La commande, le moment qui définit une vente en ligne

Pour la Cour, la commande est le point central dans la définition d’une vente.

« La simple livraison dans le magasin, y compris le paiement éventuel des produits dans les locaux, ne constitue pas une vente au détail, car la phase décisive de la vente (la conclusion du contrat d’achat) n’a pas eu lieu dans le magasin, mais dans l’espace virtuel de l’e-shop », a jugé le tribunal. « La livraison des marchandises commandées sur Internet n’est que l’une des étapes du processus de vente, et n’est pas déterminante ».

Le tribunal définit l’achat comme le moment où les deux parties expriment leur accord sur le contrat de vente. Pour une vente en ligne, c’est par exemple lorsque les produits du panier sont commandés par l’utilisateur et acceptés par le vendeur. Le paiement ou la livraison sont alors des phases accessoires du processus de vente.

Ainsi, la loi « ne s’applique pas du tout aux magasins en ligne et à leurs points de vente ». Les magasins offrent des services de retrait ou de livraison, semblables à ceux de la poste ou des services de livraison traditionnels.

La Cour a annulé la première décision du tribunal régional en raison d’une mauvaise interprétation de la loi sur les heures d’ouverture des commerces de détail et de gros. Elle considère que le processus d’un achat en ligne présente des différences fondamentales avec une vente directe dans un magasin traditionnel. De plus, si la loi interdisait les ventes en ligne livrées dans un magasin, le législateur aurait dû inclure explicitement cette situation.

Dans sa plainte, Alza.cz a également tenté de justifier que les magasins étaient inférieurs à 200 m² étant donné que la « zone de démonstration » ne faisait pas partie de la « zone de vente ». Le tribunal a rejeté cet argument mais, compte tenu de l’annulation de la décision, la société ne l’a pas contesté.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.