Le ministère de l’immigration canadien a annoncé le plafonnement des permis d’étudiants internationaux durant deux ans, dans le but est de freiner le nombre record de nouveaux arrivants, accusé de peser lourdement sur la crise du logement.

Le Canada a annoncé lundi vouloir plafonner les permis d’étudiants internationaux pour deux ans, déclarant qu’il cesserait également d’accorder des permis de travail à certains étudiants de troisième cycle. Le plafond devrait aboutir à environ 360 000 permis d’études approuvés en 2024, soit une diminution de 35 % par rapport à 2023, selon un communiqué du ministère de l’Immigration. Ce plafond temporaire de deux ans sera plus sévère dans les provinces qui ont connu une hausse rapide du nombre d’étudiants étrangers telles que l’Ontario, la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse.
« Les étudiants étrangers sont essentiels au Canada et enrichissent nos collectivités. Cela dit, nous devons nous assurer qu’ils ont accès aux ressources nécessaires pour vivre une expérience scolaire enrichissante. Au Canada, ce n’est pas toujours ce qui se passe aujourd’hui », explique Marc Miller, ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté dans le communiqué.
Les nouvelles mesures visent également à « protéger un système qui est devenu si lucratif qu’il a ouvert la voie à des abus », ajoute Marc Miller. En effet, ces dernières années, de nombreux reportages ont révélé des pratiques douteuses d’institutions recrutant massivement à l’étranger pour gonfler leurs revenus.
2 600$ pour une chambre à Toronto
Cette décision intervient en pleine crise du logement : un challenge national qui ne cesse d’entamer la popularité du Premier ministre Justin Trudeau. L’offre de logement n’a pas réussi à suivre la croissance démographique du Canada, alimentée principalement par l’immigration, compte tenu du vieillissement démographique du pays. L’accessibilité aux logements s’est fortement détériorée pendant la pandémie de coronavirus, lorsque les prix des habitations ont grimpé en raison d’une forte demande dans un contexte de faibles coûts d’emprunt.
De nombreux étudiants font face à des loyers exorbitants et une hausse du coût de la vie, devenus pour certains insoutenables. Interrogée par Le Journal de Montréal en mai dernier, Janelle Diaz, une jeune étudiante du Honduras expatriée à Toronto, déclarait : « Les propriétaires nous demandent de leur donner des références, des relevés bancaires, mais ne veulent pas ceux de mon pays, donc ils demandent des paiements en avance », expliquait alors l’étudiante de 26 ans, qui payait 2 600 dollars canadiens par mois, soit près de 1 800 euros, pour une chambre en demi-sous-sol avec trois colocataires.
Un nouveau rapport publié la semaine dernière par les sites d’annonces de logements, Urbanation et Rentals.ca, indique que le prix moyen demandé en décembre pour un logement à louer au Canada était de 2 178 dollars canadiens par mois, soit près de 1 500 euros, un nouveau record, en hausse de 8,6 % par rapport à l’année passée.
Une augmentation du nombre de résidents permanents
Des fonctionnaires fédéraux auraient averti le gouvernement il y a deux ans que de fortes augmentations de l’immigration pourraient affecter l’accès au logement et autres services, selon des documents internes obtenus par The Canadian Press et rapportés par CBC.
Le ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté aurait analysé les effets potentiels de l’immigration sur l’économie, le logement et les services, alors qu’il préparait ses objectifs d’immigration pour 2023–2025. Le vice-ministre, entre autres, aurait été averti en 2022 que la construction de logements n’avait pas suivi le rythme de la croissance démographique.
Le gouvernement fédéral avait, malgré les avertissements, décidé d’augmenter le nombre de résidents permanents que le Canada accueillerait par an à 500 000 en 2025, doublant le nombre de résidents permanents comparés aux chiffres de 2015.
Le chef de l’opposition conservatrice, Pierre Poilievre, avait attaqué Trudeau autour des pénuries de logements en fin d’année dernière, prenant une avance considérable dans les sondages d’opinion avant les élections de 2025.
En réponse, le gouvernement Trudeau a fait du logement sa priorité absolue et a annoncé une série de mesures, notamment un plan visant à convertir les propriétés fédérales en nouvelles maisons d’ici mars, ou encore, la relance d’une stratégie lancée après la Seconde Guerre mondiale consistant à utiliser des modèles pré-approuvées pour construire des maisons plus rapidement et de manière plus économique.
Le ministre du Logement, Sean Fraser, avait alors déclaré que des consultations publiques sur cette stratégie, utilisée dans les années 1950 et 1970 lorsque la demande de logements augmentait après le retour des soldats chez eux, débuteraient en janvier.