Depuis 2018, des agriculteurs lettons ont collaboré avec des scientifiques pour explorer trois méthodes d’agriculture potentiellement plus durables tout en maintenant la productivité avec l’incorporation de biochar dans les sols, la mise en place de systèmes de drainage contrôlé et l’adoption du semis direct. Avec à la clé un potentiel rôle majeur dans la quête de neutralité carbone de l’agriculture européenne.

Des agriculteurs lettons, en collaboration avec des scientifiques, ont expérimenté des méthodes d’agriculture innovantes. Depuis cinq ans, ces agriculteurs ont essayé trois pratiques novatrices – le biochar, le drainage contrôlé et le semis direct – avec l’espoir de transformer l’agriculture traditionnelle en une force positive pour le climat.
Ce projet maintenant terminé et intitulé LIFECRAFT a été financé majoritairement par la Commission Européenne avec l’objectif de trouver des solutions pour atteindre la neutralité carbone. Les scientifiques espèrent que ces nouvelles méthodes puissent être incluses dans la législation de l’Union Européenne et plus généralement dans le système de subventions de la Politique Agricole Commune (PAC). Dans leurs recherches, les résultats sur drainage et le semis direct se sont avérés prometteurs.
Des conclusions prometteuses pour le semis direct
Le semis direct consiste à ne pas labourer ses champs en se basant sur le principe de laisser la nature agir par elle-même et en minimisant au maximum l’intervention humaine.
Aivars Cimermanis, propriétaire letton de l’exploitation agricole Angi, a postulé pour essayer l’expérience du semis direct dans le cadre de LIFECRAFT. Et en l’espace de quatre ans, insectes, champignons et autres bactéries ont envahi et revitalisé les sols de l’agriculteur grâce à cette méthode.
« Les rendements ont alors été identiques, voire supérieurs » a alors déclaré Aivars Cimermanis pour LSM, la télévision publique lettone, et cela tout en diminuant la consommation de carburant à 30 à 40 litres par hectare, comparée aux 90 à 110 litres nécessaires pour son agriculture conventionnelle.
En utilisant la technique du semis direct, Aivars Cimermanis absorbe une tonne de CO2 par hectare et par an, transformant son activité avec un bilan carbone positif, lui qui a cultivé des céréales puis des haricots.
Car, en effet, le semis direct nécessite également de changer de culture chaque année. Cette méthode présente aussi des inconvénients comme le risque accru de la présence de ravageurs dans les cultures.
Ces exploitations agricoles bénéfiques pour le climat pourraient même attirer des investissements, notamment dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne.
Le drainage contrôlé pour minimiser les pertes en eau
Les résultats des scientifiques ont vu dans le système de drainage contrôlé une seconde méthode conciliant écologie et productivité.
Le système de drainage contrôlé permet de retenir l’excès d’eau sous le sol au lieu de l’évacuer vers des fossés en bordure des champs. Cela régule automatiquement le débit d’eau en fonction des besoins. Ce système offre aux agriculteurs la possibilité de minimiser les pertes d’eaux inutiles, de s’adapter aux pénuries d’eau et de réduire les risques d’inondation.
L’étude a aussi montré que le drainage contrôlé permet aux agriculteurs d’utiliser moins d’engrais car ils ne sont plus emportés vers des sources d’eaux naturelles mais sont récupérés par le système de drainage. De plus, cette solution résout aussi certains risques environnementaux car les produits chimiques ne pénètrent désormais plus les écosystèmes aquatiques et réduirait la pollution des rivières et des mares.
Des résultats plus décevants pour le charbon à usage agricole
Cependant l’incorporation de biochar dans les sols s’est avérée peu fructueuse. Le biochar, ou encore agrichar ou charbon à usage agricole, est une matière carbonée chauffée en l’absence d’oxygène. Ce processus se nomme la pyrolyse. Par exemple, le charbon de bois est considéré comme un biochar. De plus, la production de biochar est accessible à tous les agriculteurs en utilisant leurs déchets agricoles pour les transformer en charbon à usage agricole.
L’agrichar est ensuite incorporé dans le sol. L’un de ses avantages réside dans sa capacité à absorber l’eau puis à la restituer lentement dans les sols qui deviennent alors plus humides en période sèche.
Les scientifiques pensaient que l’incorporation de biochar dans les sols pourrait augmenter le rendement, mais les résultats n’ont pas été concluants. La productivité est restée relativement similaire avec et sans biochar. Le charbon à usage agricole garde tout de même des intérêts écologiques en réduisant l’acidité des sols.
Mais contrairement aux conclusions avancées par LIFECRAFT, d’autres études scientifiques ont montré que l’intégration de biochar dans les sols entraînait une nette augmentation du rendement. En rassemblant les résultats de 26 études distinctes sur le biochar, des scientifiques ont conclu qu’en moyenne, la productivité augmentait de 13% suite à l’incorporation de biochar dans les sols.