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La justice française demande à l’État de compenser les dépassements de son budget carbone

3 minutes de lecture
14 octobre 2021

La justice française a demandé à l’État de réparer le préjudice écologique de ses manques dans la lutte contre le dérèglement climatique. L’année 2020 a cependant permis à la France de respecter le budget carbone moyen des six dernières années.

Les confinements ont amélioré la qualité de l'air dans les zones urbaines françaises
Les confinements ont amélioré la qualité de l’air dans les zones urbaines françaises

Le 14 octobre, le tribunal administratif de Paris a demandé à l’État français de « réparer les conséquences de sa carence en matière de lutte contre le changement climatique ».

Pour ce faire, le tribunal a demandé que les émissions de gaz à effet de serre dépassant le budget carbone 2015–2018 soient compensées d’ici fin 2022.

Cette décision est une victoire pour les quatre organisations écologistes, dont Oxfam et Greenpeace France, qui ont saisi la Cour en 2019. Elles voulaient prouver que l’État français était défaillant dans sa lutte contre le changement climatique.

Les organisations à but non lucratif ont appelé cela « l’Affaire du Siècle » et ont également lancé une pétition recueillant 2,3 millions de signatures.

Le budget carbone établi pour une période de 4 ans, de 2015 à 2018, était une première en France. Un budget carbone est la quantité maximale des émissions de dioxyde de carbone et de gaz à effet de serre qu’un pays doit respecter pour l’atténuation des effets du dérèglement climatique.

Pour cette première période, le budget de la France avait été fixé à une moyenne annuelle de 441 millions de tonnes en équivalent en CO2 (441 Mt CO2eq). Mais la France a dépassé le budget de 62 Mt CO2eq pour l’ensemble de la période 2015–2018. Cela représente un excédent de 15,5 Mt CO2eq, soit 3,5%, chaque année en moyenne.

Le prix du carbone a atteint des sommets en 2021. Avec un prix de 61 euros la tonne en août 2021, 62 Mt CO2eq équivalent à environ 3,78 milliards d’euros.

La réduction des émissions en 2020 a permis à la France de respecter six années de budget carbone

Les budgets carbone suivants sont plus ambitieux. Le budget carbone pour la période 2019–2023 est inférieur de 4 % à celui de la période 2015–2018 (422 Mt CO2eq), et les deux autres périodes suivantes devraient viser 15 % et 16 % d’émissions de carbone en moins que la période précédente (359 et 300 Mt CO2eq).

Toutefois, la Cour a noté que la France a compensé une grande partie de l’excédent de carbone au cours de l’année 2020.

En effet, selon les estimations, les émissions de carbone ont diminué de 9,2 % en 2020 en raison de la pandémie de Covid-19 et du ralentissement de l’activité économique du pays. Les confinements successifs en 2020 ont d’ailleurs réduit les décès dus à la pollution atmosphérique en France.

Dans une moindre mesure, les émissions françaises de carbone en 2019 ont également diminué de 1,9 %.

Bien que la Cour ait souligné que cela n’était pas lié à des actions spécifiques destinées à lutter contre les émissions de gaz à effet de serre, le préjudice calculé à la date du jugement a donc été réduit à un excédent de 15 Mt CO2eq, soit seulement 0,9 % au-dessus du budget.

Au final, l’année 2020 a permis à la France de respecter le budget carbone moyen sur une période de six ans, de 2015 à 2020. Sauf que l’économie repart en 2021 et que les émissions devraient augmenter, ce qui rendra la France de fait au-dessus du budget carbone assez rapidement.

Tribunal administratif de Paris
Tribunal administratif de Paris

Pas d’amende en cas de non-compensation de l’excédent du budget carbone

Dans un premier jugement rendu en février, le tribunal a conclu que l’État n’avait pas respecté ses engagements.

En juillet 2021, pour une autre affaire, le Conseil d’État avait également enjoint le gouvernement de prendre des mesures supplémentaires afin de pouvoir réduire de les émissions de 40% par rapport à 1990 d’ici 2030, comme convenu par les membres de l’Union européenne en 2014. Le Conseil a donné jusqu’à la fin du mois de mars 2022 pour apporter les changements nécessaires afin de corriger la tendance, un délai plus court que la décision du tribunal administratif.

Le tribunal administratif de Paris n’a pas fixé de pénalité pour les retards dans la résolution du problème. Les plaignants avaient demandé à l’État de verser 78 millions d’euros tous les six mois jusqu’à ce qu’il compense l’excès d’émissions de carbone.

En 2020, le ministère français de l’environnement a estimé à 46 milliards d’euros l’investissement annuel nécessaire pour atteindre les objectifs du budget carbone de 2019–2023.

L’État ne fera pas appel de la décision.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.