Le gouvernement suédois propose une loi pour éviter une pénurie de ciment dans le pays. Mais elle va à l’encontre des décisions de justice. Le gouvernement la justifie par les conséquences éventuelles d’un arrêt de la production de ciment dans le pays.
Le 21 septembre, le ministre de l’Environnement et du Climat Per Bolund et le ministre des Affaires, de l’Industrie et de l’Innovation Ibrahim Baylan ont tenu une conférence de presse conjointe sur le site de production de ciment de Slite.
Cette conférence fait suite à une décision de la Cour suprême suédoise de l’environnement et du territoire qui n’a pas accepté de renouveler le permis d’extraction de calcaire de l’entreprise Cementa à Gotland, la plus grande île du pays située au milieu de la mer Baltique. Le permis d’exploitation minière expire le 31 octobre.
Face à une pénurie prochaine de ciment et à un arrêt de l’industrie de la construction, qui représente 11 % du produit intérieur brut de la Suède, le gouvernement a décidé de soumette une proposition de loi permettant de poursuivre l’extraction de calcaire.
Le 10 août, le gouvernement avait annoncé un mémorandum pour modifier la législation et poursuivre l’extraction et les activités hydrauliques dans des « situations exceptionnelles ».
Le projet de loi contient une modification temporaire du code de l’environnement afin que le gouvernement puisse envisager d’accorder un permis pour l’extraction de calcaire si « l’activité revêt une importance sociale et que le besoin de la société en calcaire ne peut être satisfait d’une autre manière ».
Le gouvernement ne suit pas les décisions de la justice
Mais la proposition du gouvernement va à l’encontre du système judiciaire suédois et des décisions de la Cour suprême de l’environnement et du territoire, de la Cour suprême et de l’avis du Conseil législatif. Le Conseil législatif est une agence gouvernementale qui rend un avis non contraignant sur la validité juridique des propositions de lois.
En juillet, la Cour suprême de l’environnement et du territoire de Suède avait estimé que la demande de renouvellement du permis émise par la société Cementa comportait des lacunes dans l’évaluation de l’impact de l’activité sur les eaux souterraines qui ne pouvaient être ignorées. En conséquence, la demande de permis, valable pour 20 ans, fut rejetée.
Le 25 août, la Cour suprême a conforté la décision de justice. « La Cour suprême a examiné les éléments de l’affaire et a conclu qu’il n’y a aucune raison d’accorder un appel. […] La décision de la Cour suprême du territoire et de l’environnement est donc confirmée. »
Le 9 septembre, le Conseil législatif a estimé que la loi est tellement liée à la situation actuelle qu’elle ne répondrait pas aux principes d’application générale. En tant que tel, le règlement « apparaît comme une mesure prise – non pas pour changer les règles en général – mais pour corriger le résultat du processus d’autorisation sur le ciment qui s’est terminé par la décision de la Cour suprême ».
Il a également critiqué une tentative de ne pas respecter une décision de justice : « L’introduction d’une législation entièrement axée sur la correction de l’issue d’une affaire individuelle qui a été traitée par la justice entrave la confiance dans le système juridique suédois ».
Sans ciment, des inquiétudes pour la construction en Suède
La carrière située à Slite et exploitée par Cementa, le plus grand et unique producteur de ciment en Suède, fournit 75% du ciment du pays. L’industrie a rapidement tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences d’une pénurie de ciment imminente dans le Royaume.
Byggföretagen, la Fédération suédoise de la construction, une association professionnelle représentant les entreprises de construction privées et les employeurs, a alerté que la construction de 3 nouveaux logements sur 4 en Suède serait arrêtée à partir de novembre. Elle a également affirmé que la Suède perdrait 20 milliards de couronnes suédoises (2,3 milliards de dollars) d’investissements par mois et mettrait 150 000 à 200 000 emplois en danger en raison d’une pénurie de ciment.
Début juillet, le ministre Ibrahim Baylan avait pourtant déclaré à Dagens industri que « si le verdict est maintenu, l’entreprise doit cesser ses activités ».
Les amendements vont maintenant être examinés par le Riksdag, le parlement suédois. Ils sont censés entrer en vigueur le 15 octobre et expirer à la fin de 2021.
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Sources et liens utiles :
- Regeringen beslutar om propositionen Regeringsprövning av kalkstenstäkter i undantagsfall, Communiqué de presse du gouvernement suédois, septembre 2021, accès gratuit
- Domstolen avvisar Cementas ansökan om täkttillstånd vid Slite på Gotland, Cour suprême de l’environnement et du territoire, juillet 2021, accès gratuit
- Cementa får inte prövningstillstånd, Cour suprême de Suède, août 2021, accès gratuit
- Regeringsprövning av kalkstenstäkter i undantagsfall, Conseil législatif, septembre 2021, PDF, accès gratuit
- Cementbrist leder till omfattande byggstopp visar ny analys. Byggbranschen begär omgående möte med regeringen, Swedish Construction Fededation, juillet 2021, accès gratuit
- Cementbrist leder till omfattande byggstopp visar ny analys. Byggbranschen begär omgående möte med regeringen, Fédération suédoise de la construction, juillet 2021, accès gratuit
- Efter domen mot Cementa – Byggföretagen sätter press på regeringen, Dagens industri, juillet 2021, accès gratuit