Les projets de loi sur la citoyenneté en Malaisie, entre améliorations du droit des femmes et craintes d’apatrides

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10 novembre 2023

De récentes propositions visant à modifier les lois sur la citoyenneté en Malaisie sont considérées comme favorables aux femmes et aux mères, mais d’autres sont critiquées parce qu’elles risquent de supprimer des garanties pour les personnes vulnérables et d’entraîner une augmentation du nombre d’apatrides.

Kuala Lumpur, Malaisie
Kuala Lumpur, Malaisie | © peterng1618

Depuis des décennies, les lois sur la citoyenneté en Malaisie sont perçues comme injustes et discriminatoires à l’égard des femmes.

Actuellement, la Constitution fédérale accorde automatiquement la citoyenneté malaisienne aux enfants nés à l’étranger uniquement aux hommes malaisiens ayant une épouse étrangère, mais pas aux femmes malaisiennes ayant un mari étranger, et ce malgré les décisions de justice du pays.

Il y a plusieurs mois, le gouvernement malaisien a commencé à proposer des amendements constitutionnels qui permettraient aux femmes et aux mères de transmettre automatiquement la citoyenneté aux enfants nés à l’étranger. Bien que cette mesure soit considérée comme positive, cinq nouvelles propositions de loi ont été qualifiées de régressives par les opposants à cette mesure.

Ils affirment que cela supprimerait des protections et pourrait maintenir d’actuels citoyens dans un cycle perpétuel d’apatridie.

Par exemple, un amendement à l’article constitutionnel fédéral propose de supprimer les mots « résident permanent ». Pour des groupes issus de la société civile, cela aurait pour conséquence que des enfants nés de résidents permanents apatrides n’auront plus accès automatiquement à la citoyenneté malaisienne.

L’apatridie est un problème important en Malaisie. Il peut s’agir de réfugiés tels que les Rohingya chassés de Birmanie. Mais elle peut aussi toucher des enfants né en Malaisie de parents malaisiens, sauf qu’ils n’ont pas de certificat de naissance parce que conçus hors mariage et donc non déclarés. Selon le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, il y avait encore 12 400 personnes apatrides en Malaisie en 2017.

Des affaires portées devant la justice ont déjà montré que les résidents apatrides sont souvent privés d’accès à l’éducation, aux soins de santé, à l’emploi, au logement et à la sécurité sociale.

Une autre proposition d’amendement vise à modifier l’article accordant la citoyenneté aux enfants abandonnés.

« Il doit y avoir des éléments d’enquête, des vérifications, de sorte qu’en vertu de la loi, ils puissent encore s’enregistrer en tant que citoyens », déclare Saifuddin Nasution Ismail, ministre malaisien de l’intérieur. « C’est ce que certaines ONG ont du mal à accepter. »

Des associations ont exprimé leurs désaccords aux amendements constitutionnels proposés qui toucheraient également les enfants nés hors mariage de pères malaisiens, les enfants apatrides adoptés par des parents malaisiens, les enfants trouvés ou abandonnés (y compris ceux abandonnés à la naissance), et les familles dont plusieurs générations d’enfants apatrides sont nées en Malaisie.

Pour Karen Cheah, présidente du barreau de Malaisie, les amendements proposés pourraient conduire à ce que davantage de personnes deviennent apatrides.

En réponse, le Premier ministre Anwar Ibrahim a récemment déclaré que les propositions avaient été présentées à la Conférence des dirigeants de Malaisie, qui regroupe les dirigeants et le gouverneurs des États malais, et a demandé que toute décision prise par les dirigeants soit respectée.

Tout amendement à la Constitution fédérale requiert une majorité des deux tiers au Dewan Rakyat (Chambre des représentants) pour être adopté.

Le gouvernement actuel a également annoncé qu’il étudierait les récentes propositions visant à créer des lois sur la double citoyenneté, qui n’est pas reconnue en Malaisie. À l’heure actuelle, il faut renoncer à sa nationalité pour devenir citoyen malaisien.

Jennifer Shoemaker

Jennifer est rédactrice pour Newsendip.

Elle est américaine, est née en Russie et a également vécu aux Émirats arabes unis, en Indonésie et en Malaisie. Elle a étudié à l'école internationale de Kuala Lumpur et à l'American University of Paris.