Une mannequin indienne s’est vu accorder 20 millions de roupies en 2021 à titre de dédommagement pour une coupe et un soin des cheveux dans un salon de coiffure de luxe ratés. Mais la Cour suprême indienne l’a jugé excessive et disproportionnée, faute d’éléments permettant de quantifier le montant.
La Cour suprême de l’Inde a annulé le 7 février les 20 millions de roupies (232 000 euros au moment de la décision) accordés à une mannequin en compensation d’une mauvaise coupe de cheveux et d’un mauvais traitement capillaire dans un hôtel cinq étoiles de Delhi, qui ont entraîné « une perte de revenus, une dépression, un traumatisme, des douleurs et des souffrances. »
La plus haute juridiction de l’Inde a considéré que l’indemnisation était « extrêmement excessive et disproportionnée » puisqu’elle « doit être fondée sur des preuves matérielles et non sur une simple demande », selon la décision.
Aashna Roy est une mannequin indienne qui s’est rendue en 2018 à l’hôtel ITC Maurya à New Delhi, où elle avait l’habitude d’aller se faire coiffer. Mais elle a dû ensuite faire face à « une grande humiliation et une grande gêne », sa carrière dans le monde du mannequinat étant « complètement brisée, » elle est entrée dans un « état dépressif ».
Elle était venue au salon de beauté pour avoir une « apparence propre et soignée » pour se présenter à un jury de sélection une semaine plus tard. Elle a demandé à voir Mme Alem, la coiffeuse qui lui coupait habituellement les cheveux, mais elle n’était pas disponible. Mme Christine fut alors chargée de sa coupe, le directeur du salon ayant assuré qu’elle s’était améliorée depuis les dernières expériences avec la coiffeuse qui n’avaient pas satisfait la mannequin.
Aashna Roy a demandé de longues mèches couvrant son visage à l’avant et à l’arrière et de garder 10 centimètres de longueur dans la nuque. Mais Mme Roy a enlevé ses lunettes de vue pendant la coupe de cheveux, et au bout d’une heure, a demandé pourquoi la coupe prenait autant de temps. La coiffeuse lui a alors répondu qu’elle lui faisait la « coupe londonienne ». Elle avait tout coupé en ne laissant que 10 cm sur le dessus mais en touchant à peine ses cheveux sur les épaules.
La mannequin s’est alors plaint aux responsables, affirmant même que ses cheveux étaient vendus par le salon de coiffure.
Le salon lui a ensuite offert une extension de cheveux et un soin capillaire gratuits pour son entretien. Elle s’y est rendue deux semaines après sa mauvaise expérience. Mais cela s’est avéré être de nouveau un fiasco. Un excès d’ammoniaque fut utilisé. Cela a provoqué beaucoup d’irritations et de brûlures au niveau du cuir chevelu, les cheveux sont devenus durs et rêches si bien que Mme Roy « ne pouvait même pas y passer ses doigts » dans ses cheveux.
La mannequin a donc déposé une plainte auprès de la National Consumer Disputes Redressal Commission (NCDRC) pour « harcèlement, humiliation, traumatisme mental, perte de carrière, perte de revenus et perte de perspectives ». Elle a demandé une indemnisation de 30 millions de roupies (339 000 euros au taux de change actuel).
La commission pour les droits des consommateurs s’est alors référée à un jugement antérieur qui évoquait « l’importance des cheveux dans la vie des femmes ainsi que les émotions et les sentiments qui y sont attachés ». Elle a également estimé que la médiocrité des services a « brisé son rêve de devenir un top model » et qu’elle a « subi une grave dépression et un traumatisme mental en raison des services négligents qui lui ont été fournis, ce qui lui a également fait perdre son emploi. »
Selon la NCDRC, Aashna Roy travaillait pour des produits capillaires car elle avait été mannequin pour VLCC, une société indienne de produits de beauté, et la marque Pantene grâce à ses cheveux longs. Elle travaillait également en tant que cadre supérieur et gagnait un revenu confortable à côté.
En 2021, la commission a alors accordé 20 millions de roupies (232 000 euros au moment de la décision, 226 000 euros au taux de change actuel) en compensation à Mme Roy.
ITC Limited, le groupe indien d’hôtels de luxe qui 78 hôtels dont le Maurya, fit appel de la décision. La société était représentée par des avocats, tandis que Mme Roy a comparu en personne et a plaidé elle-même sa cause.
La Cour suprême a reconnu l’existence d’un service déficient, en se fondant sur des déclarations sous serment, de photographies, d’images de vidéosurveillance, des discussions sur WhatsApp et d’autres éléments du dossier. Cependant, la Cour a jugé le montant « extrêmement excessif et disproportionné » pour compenser sa douleur, sa souffrance et son traumatisme. La Cour a estimé que la NCDRC avait commis une erreur en accordant une indemnisation aussi importante alors qu’il n’existait aucun élément tangible permettant de justifier les pertes financières ou de quantifier l’indemnisation.
Le mannequin n’a pu fournir aucun élément concernant son emploi, les émoluments qu’elle avait reçus, les missions de publicité et de mannequinat passées, présentes ou futures qu’elle était susceptible d’obtenir, ni même la lettre d’entretien pour laquelle la mannequin prétend s’être rendue au salon.
Il n’y a pas eu de demande d’informations médicales ou de preuves liées à des problèmes de santé mentale, de sensation de brûlure et d’irritation du cuir chevelu que la mannequin a également plaidé.
La Cour suprême a renvoyé l’affaire à la NCDRC pour donner à la femme la possibilité de présenter des preuves concernant sa demande.