Au Chili, le Parti républicain a la main pour remplacer une Constitution qu’il souhaite garder

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8 mai 2023

Avec l’élection des nouveaux membres du Conseil constitutionnel, les partis de droite chiliens disposeront d’une large autonomie pour rédiger une nouvelle Constitution. Mais le Parti républicain d’extrême droite a toujours voulu conserver la Constitution actuelle.

Gabriel Boric, président du Chili
Gabriel Boric, président du Chili, lors des élections pour former le Conseil constitutionnel le 7 mai 2023 | © Présidence du Chili

Le Chili a voté le 7 mai pour élire de nouveaux membres du Conseil constitutionnel, l’organe chargé de rédiger la nouvelle Constitution du pays.

Le Parti républicain, d’extrême droite, a recueilli 35,4 % des bulletins de vote valides, arrivant en tête devant la coalition de gauche au pouvoir, Unité pour le Chili, avec 28,6 % des votes comptabilisés. Chile Seguro, une alliance de partis conservateurs et de droite, est arrivé en troisième position avec 21,1 % des voix.

À l’issue des élections, les partis de droite obtiendront donc 33 des 51 sièges (50 représentants des partis politiques et un pour les communautés autochtones) qui composent l’Assemblée constituante chilienne, l’organe chargé de rédiger la nouvelle Constitution censée complètement remplacer celle de 1980 et de la dictature militaire d’Augusto Pinochet.

Ils ont par conséquent réuni plus que la majorité des trois cinquièmes nécessaire pour valider les nouveaux articles à inclure avant d’être soumis à un referendum.

Le parti républicain disposera de 22 conseillers pour rédiger les nouvelles fondations politiques du Chili. De plus, il sera le seul parti politique à bénéficier du droit de veto accordé à partir de 21 membres. L’extrême droite dirigera donc le remplacement d’une Constitution qu’elle ne voulait pas changer.

Unité pour le Chili n’aura plus de 17 membres.

En 2020, près de 80 % des Chiliens ont voté pour l’élaboration d’une nouvelle Constitution après les violentes manifestations de 2019 contre les inégalités.

Les résultats de l’élection marquent une défaite significative pour la gauche et Gabriel Boric, le président du Chili élu en décembre 2021 avec 55,9 % des voix pour apporter plus de justice sociale, de participation démocratique et une nouvelle constitution.

Un nombre sans précédent de votes nuls et blancs

M. Boric fut une figure importante des mouvements civils et a contribué à unir l’opposition de gauche et de centre-gauche en vue de l’élection présidentielle. Mais la popularité du président s’est rapidement érodée, en bonne partie à cause du processus chaotique de rédaction de la nouvelle constitution (la précédente Assemblée constituante comptait 155 membres), de projets polarisants et d’une communication confuse.

Selon Cadem, l’une des principales sociétés d’études du pays, seuls 35 % des Chiliens approuvaient l’action de M. Boric en mars.

Les partis politiques conservateurs tels que le Parti républicain, qui n’avait obtenu que quelques sièges représentatifs au sein du premier Conseil constitutionnel, remettaient aussi en question la légitimité du Conseil.

Réagissant aux résultats, José Antonio Kast, leader du Parti républicain qui a perdu le second tour de la présidentielle contre M. Boric, s’est exprimé dimanche soir depuis le siège de son parti et a déclaré que « le Chili a vaincu un gouvernement en échec ».

Arturo Squella, le président du Parti républicain, qui est désormais la première force politique du pays, a estimé qu’ils « se rendraient au Conseil avec loyauté et bonne foi. Nous défendrons avec nos meilleurs arguments les principes et les institutions qui ont fait la grandeur du Chili ». Mais pour le Parti républicain, la Constitution actuelle a surtout fourni les bases pour le développement du Chili au cours des dernières décennies.

Après les résultats, M. Boric a déclaré que « le peuple chilien a une fois de plus exprimé ses positions de manière démocratique en élisant des conseillers constituants, que j’invite à agir avec sagesse et tempérance pour rédiger un texte qui reflète la grande majorité du pays ».

L’élection, dont la participation était obligatoire sous peine d’une amende de 189 000 pesos (210 euros), a également été marquée par un nombre sans précédent de votes blancs et nuls, témoignant du mécontentement et du désintérêt des Chiliens pour le processus constitutionnel.

Plus de 2 millions de votes ont été nuls ou vides, soit près de 17 % des bulletins de vote. Ajoutés aux 570 000 votes blancs, plus de 21 % des bulletins n’exprimaient pas de préférence.

Bien qu’ils n’aient pas été pris en compte dans les résultats finaux, ils ont recueilli plus de voix que n’importe quel autre parti politique, à l’exception du Parti républicain.

Le mois dernier, un sondage d’opinion avait montré que seuls 31 % des Chiliens étaient intéressés par cette deuxième tentative de formation d’un conseil chargé de rédiger la nouvelle constitution.

Deux ans plus tôt, lorsque les premiers conseillers ont été choisis, la même enquête a montré que 60 % des citoyens étaient intéressés par le processus. À l’époque, les votes nuls ne représentaient que 3 % des bulletins de vote, un jour où les Chiliens votaient également pour élire les maires, les conseillers municipaux et les gouverneurs régionaux.

Le premier projet de Constitution a été rejeté à 62 % par référendum en septembre 2022. La nouvelle proposition de Magna Carta devrait être soumise à un plébiscite public le 17 décembre prochain.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.

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