La Croatie a réussi à remplir toutes les conditions de la Commission européenne pour l’adoption de l’euro en janvier 2023, dix ans après son adhésion à l’Union européenne. La Roumanie n’en a rempli aucune.
La Commission européenne et la Banque centrale européenne ont publié leurs rapports de convergence le 1er juin. Tous deux distincts mais similaires et publiés tous les deux ans, ces rapports fournissent une évaluation des progrès réalisés par les États membres n’appartenant pas à la zone euro en vue de leur adhésion à la zone euro.
Et l’année prochaine, la zone euro ajoutera probablement la Croatie et les Croates aux 19 autres pays et aux 343 millions de citoyens qui utilisent la monnaie de l’Union européenne. Le Conseil de l’U.E. devrait prendre la décision officielle en juillet.
Le rapport de la Commission européenne a évalué les progrès réalisés par la Bulgarie, la République tchèque, la Croatie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie et la Suède en vue de l’adoption de l’euro.
Il a conclut que la Croatie remplissait les quatre critères de convergence et disposait d’une législation compatible avec la zone euro, ce qui ouvre la voie à son adoption de la monnaie en janvier 2023. Cette décision « marque une étape cruciale et historique dans le cheminement de la Croatie vers l’adoption de l’euro », indique le communiqué de presse de la commission. De même, la BCE estime que la Croatie respecte les valeurs de référence des critères de convergence.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a félicité la Croatie, qui « a fait un pas important vers l’adoption de l’euro ». La nouvelle monnaie au 1er janvier « rendra l’économie croate plus forte et profitera à ses citoyens, aux entreprises et à la société dans son ensemble. »
« Nous sommes très fiers de ce succès et nous nous réjouissons de tous les avantages que cela apportera à la Croatie, tout en étant conscients de la responsabilité que cette adhésion implique », a déclaré Boris Vujčić, le gouverneur de la Banque nationale de Croatie suite aux conclusions des deux rapports.
Les dessins des pièces d’euros croates sont déjà prêts et validés par le Conseil de l’U.E., malgré une controverse avec la Slovénie sur l’utilisation de Nikola Tesla comme effigie pour la face nationale des pièces de 50, 20 et 10 centimes. Par ailleurs, un concours de design a dû recommencer pour le revers de la pièce d’un euro en raison d’un problème de plagiat du motif de la martre, appelée kuna en croate, le nom de la future ancienne monnaie.
La pandémie de COVID-19 a particulièrement affecté le critère de stabilité des prix pour l’adoption de l’euro
Quatre critères sont évalués par la Commission européenne pour l’entrée dans la zone euro : la stabilité des prix, des finances publiques, une stabilité du taux de change, et la durabilité de la convergence.
Seules la Croatie et la Suède ont rempli le critère de stabilité des prix, avec des taux d’inflation moyens respectifs de 4,7 % et 3,7 % au cours des 12 mois précédant avril 2022, inférieurs à la valeur de référence de 4,9 %. Mais la Suède n’a pas rempli le critère du taux de change, la couronne s’étant appréciée de près de 8 % par rapport à l’euro entre avril 2020 et novembre 2021.
La République tchèque (6,2%), la Hongrie (6,8%), la Pologne (7,0%), la Roumanie (6,4%) et la Bulgarie (5,9%) n’ont pas rempli basé sur sur l’indice des prix à la consommation harmonisé.
Dans un contexte de hausse des prix, la stabilité de l’indice était plus difficile à atteindre bien qu’elle ait été évaluée comparativement au reste de la zone euro. L’inflation moyenne ne doit pas être supérieure de plus de 1,5 point de pourcentage au taux des trois pays de l’UE les plus performants en termes de stabilité des prix.
La valeur de référence de l’inflation a été calculée à 4,9 % en avril 2022 ; la France, la Finlande et la Grèce étant les trois « États membres les plus performants ». Il s’agit de la valeur de référence la plus élevée depuis que ces rapports ont commencé à être publiés en 1998. En 2020, la valeur de référence était de 1,8 %.
Les chocs économiques déclenchés par la pandémie COVID-19 et l’invasion de l’Ukraine par la Russie ont eu « des implications importantes pour l’évaluation de la convergence », et notamment pour le critère de stabilité des prix, note le rapport.
De plus, l’impact de la guerre en Ukraine n’est pas totalement pris en compte car les moyennes sur un an reflètent principalement la situation avant l’invasion russe. Malgré de fortes incertitudes, l’inflation dans la zone euro devrait atteindre 6,1 % en 2022 avant de redescendre à 2,7 % en 2023, selon les prévisions économiques du printemps 2022 publiées le 16 mai, qui servent à évaluer le caractère durable de la convergence.
Selon l’analyse de la Commission européenne, tous les États membres sont généralement bien intégrés économiquement et financièrement dans l’U.E. mais certains d’entre eux connaissent des vulnérabilités macroéconomiques et/ou des cadres institutionnels qui font peser des risques sur la durabilité du processus de convergence.
La Roumanie est le seul pays qui n’a satisfait à aucun des critères d’adoption de l’euro
Les quatre critères d’évaluation sont mesurés par l’inflation, le déficit et la dette publics, la stabilité du taux de change au cours des deux dernières années et les taux d’intérêt à long terme. Ces derniers ne doivent pas être supérieurs de plus de deux points de pourcentage au taux des trois pays de l’UE les plus performants.
Dans le rapport de 2020, la Croatie ne remplissait pas le critère de stabilité du taux de change. Mais la Croatie a participé au mécanisme de taux de change européen avec la kuna depuis le 10 juillet 2020, tout comme la Bulgarie et son lev. Toutes deux satisfont désormais au critère de taux de change.
Cependant, l’objectif de la Bulgarie d’adopter la monnaie de l’UE à partir de 2024, confirmé par le Premier ministre bulgare Kiril Petkov en janvier dernier, semble peu probable. La Bulgarie ne remplit pas le critère de stabilité des prix et ne dispose pas du cadre législatif requis en raison, par exemple, « d’imperfections dans les domaines de l’indépendance de la banque centrale ».
La Roumanie est le seul pays qui ne remplit aucun des quatre critères. Elle est également le seul pays à ne pas remplir les conditions de finances publiques saines avec une « procédure pour déficit excessif ». C’était déjà le cas dans le rapport de 2020.
Le déficit de la Roumanie était de 7,1 % du produit intérieur brut en 2021 et de 9,3 % en 2020, alors que le déficit moyen de l’UE était de 4,7 % du PIB en 2021 et de 6,8 % en 2020. La Roumanie, qui devait initialement adopter la nouvelle monnaie en 2014 a repoussé l’échéance à 2019, puis à 2024. Et depuis décembre, la Roumanie vise 2029.
Tous les États membres de l’UE, à l’exception du Danemark qui n’est donc pas couvert par le rapport, se sont légalement engagés à rejoindre la zone euro, mais chaque pays calibre son plan d’adhésion à l’euro.
Le rapport de convergence de la Commission européenne sert de base au Conseil de l’UE pour décider si un État membre remplit les conditions pour rejoindre la zone euro. Le conseil prendra les décisions finales sur l’adoption de l’euro par la Croatie au cours de la première quinzaine de juillet.
En 2013, la Croatie est devenue le dernier pays à devenir membre de l’UE, tandis que la Bulgarie et la Roumanie l’ont rejointe en 2007.