Une taxe sur les transactions électroniques a suscité une forte opposition au Ghana. Appliquée depuis le 1er mai, les membres de l’opposition espèrent toujours la faire abroger.
La taxe controversée sur les transactions électroniques, ou E‑levy, a été mise en œuvre le 1er mai avec quelques problèmes au démarrage, après des mois de négociations et de débats passionnés. Mais les membres de l’opposition espèrent toujours la voir abrogée.
En novembre 2021, le ministre ghanéen des Finances a annoncé la mise en place d’une taxe de 1,75 % sur les transactions électroniques, initialement prévue pour janvier 2022, afin de collecter 9 milliards de cedis par an (1,2 milliard de dollars).
Pour le gouvernement, cette E‑levy permettra d’étendre l’assiette fiscale et de s’assurer que les activités de l’économie informelle contribuent aussi au développement du pays. Les recettes permettront de financer le programme YouStart, qui nécessite 10 milliards de cedis pour les trois prochaines années afin de soutenir les jeunes entrepreneurs.
De l’autre côté, les détracteurs de cette taxe estiment qu’elle nuira aux personnes à faible revenu, à celles qui ne font pas partie du secteur bancaire traditionnel et qui transfèrent leur argent directement de leur téléphone portable. L’E-levy s’applique en effet aux transactions électroniques opérées via mobile, à l’exception du paiement des impôts ou des transferts entre deux comptes du même propriétaire.
Les paiements via mobile ont été introduits au Ghana en 2009 et sont devenus très utilisés. Grâce à leur portefeuille électronique, les Ghanéens peuvent épargner, envoyer et recevoir de l’argent à l’aide de leur téléphone portable, ce qui a amélioré l’inclusion financière de la population puisque la création d’un compte bancaire, le paiement des factures automatiquement et la gestion d’une épargne deviennent plus faciles.
Les opérateurs craignent désormais que les personnes se remettent à payer en espèces et réduisent leur activité numérique.
Compte tenu de la forte opposition au projet, la E‑levy a été modifiée de manière à exempter les paiements lorsqu’ils atteignent moins de 100 GH¢ (14 $) par jour, ce qui représente environ 7 jours payés au salaire minimum. Le taux de la taxe a également été réduite à 1,5 % avant que le projet de loi ne soit voté au Parlement. De 9 milliards de cedis à 6,9 milliards (945 millions $), le gouvernement prévoit maintenant que la taxe rapportera 4,5 milliards par an (616 millions $).
En décembre, une bagarre entre parlementaires lors d’un débat sur la taxe numérique. Un militant opposé à la taxe a été arrêté et inculpé pour crime de trahison en février après un post sur Facebook que les autorités ont considéré comme un appel à un coup d’État.
Lors de la troisième lecture du projet de loi, l’E-levy a finalement été adopté par le Parlement le 29 mars, alors que les membres de l’opposition ont quitté la chambre juste avant le vote, qui s’est quand même déroulé et fut approuvé par la majorité lors d’un vote par acclamation.
Le Parti national démocratique (NDC) estime que les participants n’ont pas atteint le quorum et que, par conséquent, le résultat est inconstitutionnel. Une plainte a donc été portée devant la Cour suprême. Le procureur général soutient que le quorum a été atteint.
Le parlementaire du NDC Samuel Okudzeto Ablakwa a écrit sur Facebook qu’il s’attendrait à « descendre dans la rue » si la Cour suprême rejetait leur demande. Il a ajouté que les manifestations massives de 1995 contre la mise en place de la TVA, menées par l’actuel président Nana Akufo-Addo, feraient pâle figure en comparaison.
John Dramani Mahama, le président du Ghana entre 2012 et 2017 issu du NDC, a déclaré lundi lors d’une conférence qu’un gouvernement NDC en 2025 abrogerait la loi E‑levy pour « sortir la nation du trou d’enfer dans lequel le gouvernement nous a plongés ». M. Mahama a déclaré qu’il n’était pas opposé à la taxation, mais que la taxe électronique était une mesure contraignante aux bénéfices limités, destinée à compenser la mauvaise gestion de l’économie ghanéenne par le gouvernement actuel.
L’audience de la Cour suprême est prévue le 5 mai. (Mise à jour : la Cour a unanimement rejeté la plainte.)