Le Liban n’a pas assez de passeports pour répondre à de nouvelles demandes et a décidé de suspendre la plateforme de réservation, complète jusqu’en avril 2023.
La Direction générale de la sureté générale du Liban a annoncé le 28 avril qu’elle mettait en pause les demandes de nouveaux passeports jusqu’à ce qu’elle dispose de fonds suffisant pour en émettre davantage.
Depuis mercredi, la plateforme de réservation en ligne a cessé de fonctionner car les demandes sont complètes jusqu’en avril 2023, a déclaré le directeur général de la sureté, le Général Ibrahim Abbas.
L’agence ne dispose pas d’un stock suffisant pour émettre de nouveaux passeports au-delà de cette date. Elle n’a de plus pas les crédits disponibles pour commander de nouveaux papiers d’identité. La direction a donc été « contrainte d’arrêter la plateforme de rendez-vous pour les passeports » afin de « préserver la crédibilité de la sûreté générale vis-à-vis des citoyens ».
Les problèmes pour se procurer un passeport libanais n’est pas nouveau. Mais ne pas permettre à ses citoyens d’obtenir des papiers d’identité, qui permettent de quitter le pays, pour des raisons financières est sans précédent.
Depuis 2020, le nombre de demandes de nouveaux passeports a été multiplié par dix par rapport aux années précédentes, selon le communiqué de la sûreté générale. Les centres de traitement sont submergés de demandes, incapables de les traiter et de remettre les passeports dans les délais impartis.
Les autorités ont tendance à justifier les nombreuses demandes du fait des expatriés, ils seraient plus nombreux que la population vivant dans le pays, qui demandent à renouveler leur passeport lors d’un retour temporaire au pays.
Mais alors que le Liban est dans une crise profonde depuis 2019, nombreux sont les Libanais qui souhaitent en réalité quitter le pays. Sa monnaie a perdu 90% de sa valeur et plus des trois quarts de la population est passée sous le seuil de pauvreté.
Environ 77 000 personnes auraient quitté le Liban en 2021, dont beaucoup de jeunes et de diplômés. Un sondage réalisé par Gallup en août a montré que 63 % des personnes souhaitent quitter définitivement le pays. Selon l’Arab Barometer sorti ce mois-ci, la moitié des habitants aspirent à quitter le pays pour de meilleures opportunités, davantage à cause de la corruption, de l’insécurité et de la crise politique que pour des raisons économiques.
En mars, le Liban a décidé de donner la priorité à certains citoyens dans le processus d’octroi de passeports, comme ceux qui étudient ou qui ont un emploi à l’étranger avec des documents expirés ou proches de la date de fin de validité.
L’agence avait précédemment déclaré que les demandes pouvaient être de l’ordre des 8 000 par jour alors qu’elle est en mesure d’en traiter 3 500 quotidiennement, ce qui équivaut à une capacité de près d’un million de passeports par an.
En décembre, Ibrahim Abbas a annoncé que l’agence disposerait de fonds pour un million de passeports dans les deux mois à venir, ce qui aurait donc suffi à répondre aux besoins pour une année supplémentaire. Le 7 avril, le président Michel Aoun a signé un décret approuvé par le parlement prévoyant 300 milliards de livres libanaises (20 millions de dollars au taux de change du 29 avril) pour couvrir les dépenses liées à l’émission d’un million de passeports libanais.
Mais le général a déclaré que la Banque du Liban n’a pas envoyé les fonds pour que le prestataire français les livre. L’argent a servi à payer la plateforme de réservation, qui est maintenant fermée puisque les passeports vont manquer.
Selon son site internet, le groupe français Thalès, qui dispose d’un département Identité numérique et Sécurité, fournit le Liban pour ses passeports biométriques mais la société n’a pas communiqué sur le sujet. Thalès n’a pas répondu à la demande de Newsendip pour confirmer la situation. (Mise à jour : Thalès ne souhaite pas s’exprimer sur le sujet.)
Ibrahim Abbas a assuré que toute personne ayant déjà un rendez-vous pourrait obtenir un passeport, mais qu’il n’y aurait pas de nouvelle date jusqu’à ce qu’ils puissent émettre plus de passeports, au plus tôt en avril 2023 de toute façon.
Il a ajouté qu’il espérait que cette décision puisse servir d’alerte pour recevoir rapidement les fonds nécessaires rapidement.