Les parlementaires roumains ne sont plus autorisés à filmer et à diffuser en direct les séances du Parlement. Cette décision fait suite à une empoignade lors du discours du ministre de l’énergie à la tribune de la Chambre des députés.
Le Parlement roumain a adopté le 9 février des amendements au règlement intérieur de la Chambre, un jour après avoir été proposés par trois partis politiques.
Selon les nouvelles règles, le recours à la violence verbale ou physique est expressément interdit.
Les personnes ne seront pas autorisées à diffuser et à retransmettre en direct, comme avec Facebook Live, les sessions plénières du Parlement, les réunions des commissions et les débats.
Seules les images officielles approuvées par la Chambre des députés, ou les médias ayant reçu une autorisation en bonne et due forme, seront désormais autorisées à informer les Roumains des débats publics.
L’affichage de bannières politiques est également interdit.
Toute infraction à ces règles peut entraîner une réduction du temps de parole à 10 secondes lors des sessions pendant trois mois, une diminution de 50 % du salaire, ou encore l’interdiction pour les employés du Parlement d’aider les contrevenants.
De plus en plus de politiques utilisent les réseaux sociaux en direct comme outil de communication sans intermédiaire avec les électeurs. Mais le live stream est aussi critiqué pour son manque de contrôle sur le contenu, et les personnes peuvent aussi l’utiliser pour des coups de communication.
Six associations non gouvernementales ont signé une lettre ouverte dénonçant les amendements. Elles ont estimé qu’ils rendraient le corps législatif roumain encore plus opaque qu’il ne l’est aujourd’hui.
« L’interdiction d’afficher des banderoles au Parlement, ainsi que l’interdiction de filmer ou de diffuser en direct sur Internet, constituent, selon nous, une restriction de la liberté d’expression, qui est un droit fondamental d’autant plus protégé lorsqu’il s’agit de débat politique. » Les signataires ont appelé « les partis politiques du Parlement à ne pas utiliser le prétexte de l’agression en plénière de la Chambre des députés pour limiter la transparence des débats parlementaires et la liberté de tous les citoyens, y compris des parlementaires, de s’exprimer dans le cadre du processus législatif ».
Interruption du discours du ministre de l’énergie par un chef de parti
Les amendements ont été proposés après que le ministre roumain de l’énergie a été agressé lundi pendant son discours par un chef de parti.
Virgil Popescu, le ministre roumain de l’énergie, s’exprimait à la tribune de la Chambre des députés le 7 février lorsque George Simion est soudainement monté sur scène, a empoigné le ministre et lui a répété à haute voix pendant quelques secondes qu’il était un voleur.
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George Simion est le leader de l’Alliance pour l’Union des Roumains.
Le parti AUR, qui signifie or en roumain, est un parti populiste d’extrême droite créé en 2019 actif en Roumanie et en Moldavie. Il a obtenu 9% des voix lors des dernières élections législatives de 2020 au Sénat et à la Chambre des députés.
George Simion a déclaré qu’il ne regrettait pas l’agression mais qu’il était également heureux de ne pas l’avoir frappé car cela aurait signifié la fin de sa carrière politique. Il a également déclaré qu’il continuerait à utiliser Facebook live et a dénoncé la censure créée par les amendements.
Motion de censure contre le ministre de l’énergie de la Roumanie
La session fut ajournée mais a repris plus tard. Le bureau du procureur général a ouvert un dossier pour outrage dans le Parlement et trouble de l’ordre public.
Le ministre prononçait un discours contre une motion de censure qui le visait. La semaine dernière, l’USR, un parti progressiste et le troisième plus grand parti politique de Roumanie, a lancé une motion simple, un type de motion de censure non légalement contraignante, contre le ministre de l’énergie.
L’USR a accusé Virgil Popescu de « mettre en danger la sécurité énergétique de la Roumanie » en ne réformant pas le secteur de l’énergie, en ne libéralisant pas le marché de l’énergie, ou encore en augmentant la dépendance au gaz russe. L’USR considère également que la gestion de la crise de la facture énergétique est un « désastre ».
Pour Dacian Cioloș, ancien Premier ministre et ancien président de l’USR, l’incident a en fait offert une diversion au ministre et a reporté sa démission. « Au lieu d’être renvoyé par le Premier ministre Ciuca, il a gagné du temps avec l’aide de l’AUR ». Et d’autre part, « l’AUR gagne quelques points supplémentaires dans la radicalisation de son électorat », a‑t-il écrit sur Facebook.
Le 9 février, 202 parlementaires en faveur des amendements. Le même jour, la motion de censure contre le ministre de l’énergie fut rejetée par 190 législateurs.