Les désaccords entre l’Égypte, le Soudan et l’Éthiopie sur le Grand barrage de la Renaissance
ne sont toujours pas résolus. L’Égypte se sent vulnérable, le Soudan durcit son approche, l’Éthiopie rejette les traités datant de l’ère coloniale. Et les réservoirs vont bientôt être remplis pour la deuxième année de suite sans accord.
Échec des négociations entre l’Égypte, le Soudan et l’Éthiopie
Les discussions organisées par l’Union africaine entre l’Égypte, le Soudan et l’Éthiopie au sujet du Grand barrage de la Renaissance n’ont pas abouti. Alors que le projet est sur le point d’être finalisé, la tension monte.
L’Égypte et le Soudan demandent une médiation internationale, ce que l’Éthiopie refuse. Le Soudan souhaite que les États-Unis, l’ONU et l’Union européenne participent en tant que médiateurs et non plus en tant qu’observateurs, tandis que l’Éthiopie souhaite que l’Union africaine continue de diriger entièrement les négociations.
Le projet éthiopien du Grand barrage de la Renaissance a débuté en 2011 et a été source de tensions entre les pays. Il s’agira du plus grand barrage d’Afrique. Il pourrait fournir de l’électricité à 60 % de la population éthiopienne en 2022, alors que l’Éthiopie vient de recevoir des offres pour la privatisation de son secteur des télécommunications, première étape de la libéralisation de son économie.
Les pays ont déjà conclu des accords par le passé, mais le débit d’eau en aval du barrage est le point de friction qui n’a toujours pas été résolu.
La quantité d’eau au cœur des préoccupations égyptiennes
Le Premier ministre égyptien Mostafa Madbouly a déclaré que « l’Égypte ne cédera pas une seule goutte de sa part de l’eau du Nil ». Le Nil est en effet crucial pour l’Égypte, qui en dépend pour son agriculture et son commerce. Le barrage rend l’Égypte vulnérable face à l’Éthiopie, qui aurait le pouvoir de réguler le débit d’eau.
Le porte-parole du ministère éthiopien des affaires étrangères, Dina Mufti, a rejeté les accords historiques sur le partage des eaux du Nil conclus en 1959 et en 1929.
En 1959, l’Égypte et le Soudan ont obtenu une quantité minimale d’eau qu’ils devaient recevoir du Nil, sans se référer aux neuf autres pays où coule le Nil. En 1929, la Grande-Bretagne, qui représentait à l’époque l’Ouganda, le Kenya, la Tanzanie et le Soudan, avait accordé à l’Égypte un droit de veto sur tout projet concernant les eaux en amont du Nil et qui pourrait donc avoir une incidence sur sa part. En 2010, les États riverains supérieurs ont trouvé un accord, que l’Égypte et le Soudan n’ont pas signé. L’Égypte préfère en effet les traités qu’elle avait signés.
Le Soudan a d’abord accueilli favorablement le projet, car il pourrait réguler les inondations qui touchent le pays ou même permettre une troisième récolte par an. Le pays y voyait également l’opportunité d’obtenir un approvisionnement en électricité plus stable. Cependant, l’influence croissante de l’armée au Soudan, sa proximité avec l’Égypte et ses revendications frontalières avec l’Éthiopie rendent les discussions diplomatiques plus tendues.
De son côté, l’Éthiopie souhaite également disposer d’une certaine souplesse dans la gestion du cours en cas de sécheresse, suggérant qu’il pourrait être utilisé à des fins agricoles plutôt que comme source d’électricité.
Avec la saison des pluies qui approche, les réservoirs derrière le barrage vont commencer à se remplir pour la deuxième année sans accord. Cette fois, la quantité d’eau sera trois fois supérieure à ce que le réservoir contenait l’année précédente.