La Bank of New Zealand veut fermer les comptes de Gloriavale, une communauté chrétienne condamnée pour travail d’enfants. Mais Gloriavale se bat devant les tribunaux pour que ses comptes bancaires restent ouverts.
Le Christian Church Community Trust, plus connu sous le nom de Gloriavale, est basé à Haupiri, sur la côte ouest de l’île du Sud de la Nouvelle-Zélande. La communauté compte environ 600 personnes réparties dans environ 90 familles.
La communauté est devenue célèbre en Nouvelle-Zélande après avoir ouvert ses portes et partagé son mode de vie unique dans une série documentaire en trois parties de 2014 à 2016. Ce documentaire a montré un groupe religieux extrêmement conservateur et presque autosuffisant, ce qui a suscité des opinions divergentes à son sujet.
Les membres vivent essentiellement de l’agriculture, portent les mêmes tenues démodées, prient d’abord Dieu pour qu’il les guérisse lorsqu’ils sont malades, interdisent tout contact physique entre les couples avant leur mariage et tout recours à la contraception.
Certains considèrent la communauté comme une secte ou un culte, ce qu’elle nie. Les personnes qui décident de quitter la communauté sont excommuniées.
Selon leur site internet, la communauté vit principalement des revenus d’une grande ferme laitière et d’un élevage de cerfs. Ils gèrent quelques usines qui transforment des produits agricoles. Elle possède et exploite également quelques avions légers pour des vols panoramiques. Les personnes extérieures peuvent visiter la communauté, les entendre prêcher l’évangile ou assister à des concerts qu’elle organise.
Mais en mai de l’année dernière, un tribunal du travail a estimé que trois anciens membres avaient commencé à travailler dans la communauté dès l’âge de 6 ans, les considérant comme des employés plutôt que comme des bénévoles.
David Pilgrim, Hosea Courage et Levi Courage ont contesté les décisions de l’inspection du travail qui refusait d’enquêter sur leurs conditions de travail parce qu’ils étaient bénévoles.
La Cour a estimé que les tâches qu’ils ont accomplies de 6 à 14 ans ne pouvaient être considérées comme des « corvées », compte tenu de la nature commerciale de leur travail qui était « pénible, difficile et parfois dangereux ».
Ils pouvaient travailler jusqu’à 70 heures par semaine. Les chefs de la communauté, faisant figures d’autorité et appelés « bergers », pouvaient les frapper ou leur refuser de la nourriture s’ils ne travaillaient pas assez vite.
Levi Courage a témoigné devant le tribunal qu’un jour, à l’âge de 15 ans, ils ont dû répondre à une commande de 200 000 pots de miel en seulement trois jours. Lui et plusieurs autres garçons ont travaillé pendant 50 heures sans dormir, ont eu une pause de quatre heures et ont ensuite travaillé 72 heures d’affilée pour terminer la commande.
Par conséquent, la BNZ a décidé de mettre fin à ses relations commerciales de 40 ans avec Gloraviale, arguant que ce cas de travail des enfants allait à l’encontre de sa politique en matière de droits de l’homme. En juillet, la banque a donné à Gloraviale trois mois pour trouver une autre institution avant de fermer ses comptes.
Mais la communauté souhaite rester cliente, et l’affaire a été portée aux tribunaux sans qu’une solution soit trouvée entre les deux parties. Plusieurs banques comme ASB et Kiwibank ont refusé d’ouvrir des comptes pour les entités commerciales de Gloraviale.
Lors d’une audience à la Haute Cour de Christchurch le 30 mai, Gloraviale a demandé une injonction provisoire pour maintenir son compte bancaire ouvert. À la fin de l’année dernière, la communauté a obtenu une injonction similaire empêchant BNZ de fermer les comptes en attendant la suite d’autres procédures légales.
En août 2022, à la suite de la décision du tribunal de l’emploi, six anciens membres ont porté plainte devant ce tribunal pour des années de travail domestique non rémunéré.
La communauté affirme que les membres ne pourraient plus manger si les comptes étaient fermés.
Lors de l’audience, l’avocat de Gloraviale a fait valoir que BNZ n’avait pas de raison rationnelle et valable prévue par la loi pour justifier la suppression du compteet qu’elle ne pouvait pas le faire uniquement parce qu’elle n’aimait pas quelqu’un, selon le média Stuff.
La BNZ a défendu son droit de cesser de servir un client et a fait valoir que les neuf millions de dollars néo-zélandais (500 000 millions d’euros) déposés sur le compte ne seraient ni confisqués ni gelés si les comptes étaient fermés.
Les affaires de travail des enfants ont incité d’autres entreprises à cesser de collaborer avec la communauté chrétienne.
L’une des entreprises de Gloriavale a obtenu une injonction provisoire obligeant la société Westland Dairy à poursuivre la collecte de lait auprès de la communauté, qui avait avancé des violations du droit du travail pour suspendre un contrat d’une valeur de 8 millions de dollars néo-zélandais par an.
Les entreprises de Gloriavale ont perdu une licence authentifiant leur miel Mānuka, le Mānuka étant un arbre endémique de Nouvelle-Zélande et d’Australie. Certaines entreprises de l’agroalimentaire ont cessé d’approvisionner Gloriavale en abats, traités dans leur usine d’équarrissage en nourriture pour animaux.
En mai 2022, la communauté a présenté ses excuses pour divers abus commis au sein de la communauté. Elle a déclaré que beaucoup de choses avaient changé depuis la mort en 2018 de son fondateur et dirigeant, Neville Cooper, également connu sous le nom de Hopeful Christian et décrit comme un dictateur par les enfants victimes du travail forcé.
En 1995, Hopeful Christian a été condamné en emprisonné pour agression sexuelle, mais BNZ a conservé la communauté comme client.
Une décision sur l’affaire est attendue d’ici quelques semaines.