La promotion du bien-être animal dans l’industrie porcine en Norvège mise à mal par de nouvelles vidéos

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11 juin 2021

En 2019, l’industrie porcine a largement promu la garantie du bien-être des cochons après la publication d’un documentaire dénonçant les conditions de vie des animaux. Mais en 2021, de nouvelles vidéos mettent à mal l’idée que les problèmes ont été résolus.

La publicité publiée en 2019 fait la promotion du bien-être animal pour les porcs de Nortura
La publicité publiée en 2019 fait la promotion du bien-être animal pour les porcs de Nortura.

En 2019, NRK, la télé publique norvégienne, a publié un documentaire sur les mauvaises conditions de vie des animaux au sein des porcheries norvégiennes.

Il a donné lieu à une série de réunions avec les plus grands acteurs de l’industrie à la demande du ministre de l’Agriculture. Elles se sont conclues sur les promesses d’installations de vidéosurveillance à l’intérieur des bâtiments, de formation des éleveurs ou de mise en place d’un programme obligatoire de protection des animaux. Reconnaissant que les porcs sont des animaux propres et curieux, l’industrie a recommandé un espace minimal et propre pour chaque porc, de la paille sur le sol ou même des sortes de pompons pour qu’ils puissent jouer.

Un an plus tard, l’Union des agriculteurs norvégiens déclarait que les conditions de vie des porcs étaient bonnes.

Mais des militants du Network for Animals, une organisation non gouvernementale de protection des animaux, ont visité anonymement au moins 28 exploitations après les changements annoncés en 2019.

Ils se sont introduits dans les porcheries la nuit et ont enregistré des conditions de vie déplorables.

Presque tous les porcs filmés vivaient encore sur du béton, entourés de saleté et d’excréments. Des animaux morts gisaient parfois sur le sol. D’autres étaient malades ou blessés. Les activistes ont également filmé des queues de cochons, qui donnent une indication pour savoir si les animaux sont heureux lorsque leur queue s’enroule.

Certaines exploitations vendaient des porcs et des truies à Gilde et Nortura, un grand abattoir et le plus grand fournisseur agroalimentaire de Norvège. Pourtant, l’entreprise avait annoncé qu’elle garantissait le bien-être des animaux. « Si l’emballage porte la mention Gilde, vous pouvez être sûr que la viande est norvégienne et que les animaux se portent bien », promettait l’entreprise dans le plus grand journal norvégien en 2019.

Contactée par NKR, Nortura avait déjà identifié des problèmes avec la moitié des fermes impliquées dans les vidéos et pris des mesures – deux agriculteurs avaient déjà cessé leurs activités, par exemple. « Nous n’avons pas atteint la ligne d’arrivée, mais nous continuons le travail », a déclaré le président à NRK. Sur les 1 500 fournisseurs de porcs de Nortura, 298 ont été retirés de la liste pour cause de mauvais bien-être animal, 26 ont été interdits et 12 ont cessé leur activité.

La publicité sur le bien-être animal n’était qu’une opération de communication

Mais le géant de l’agroalimentaire reconnaît aujourd’hui que les affirmations dans la publicité étaient fausses. « Oui, c’était du greenwashing », a reconnu le vice-président de Nortura. L’Agence norvégienne de la consommation a conclu qu’il s’agissait d’une campagne de marketing trompeuse.

Les différents acteurs ont condamné les vidéos et reconnu que des améliorations étaient encore nécessaires. Cependant, l’Union des agriculteurs norvégiens considère que les vidéos ne sont pas représentatives des 2 000 producteurs de porcs norvégiens. Le 10 juin, l’assemblée annuelle du syndicat a adopté une résolution stipulant que tous les animaux doivent être bien traités. Elle souhaiterait un rapport du Parlement sur le bien-être des animaux.

Nortura demande également à l’Autorité norvégienne de sécurité alimentaire de venir plus souvent dans les exploitations pour des inspections inopinées.

En 2019, l’Autorité norvégienne de sécurité alimentaire a constaté 217 infractions, que NKR a pu étudier. La moitié des infractions étaient dues à un manque de litière sèche, d’espace, d’eau ou de poubelles nettoyées. Un autre tiers était dû au fait que les animaux malades ou blessés ne recevaient pas de traitement.

L’analyse a montré que peu d’exploitations ont été contrôlées après avoir été sommées d’améliorer les conditions de vie. L’autorité faisait surtout confiance aux éleveurs qui affirmaient que des modifications avaient été apportées. Pourtant, dans une ferme, l’autorité norvégienne de sécurité alimentaire a contrôlé et constaté des violations répétées du bien-être animal pendant huit années.

Dans le cadre de la surveillance du bien-être des porcs 2021–2022, l’Autorité norvégienne de sécurité alimentaire a contrôlé 73 exploitations au cours du premier trimestre 2021. Mais le site internet mentionne qu’il est trop tôt pour tirer des statistiques ou des conclusions des résultats.

Et comme en 2019, tous les acteurs font montre de bonne volonté mais souhaitent également que les autorités leur montrent la voie.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.