Eskom, la compagnie nationale d’électricité d’Afrique du Sud, organise des coupures de courant récurrentes car elle peine à répondre à la demande nationale, ce qui affecte l’économie du pays et la vie quotidienne de nombreuses personnes.
Eskom, la compagnie nationale d’électricité d’Afrique du Sud, a annoncé qu’elle appliquait le stade 4 de délestage du 5 au 7 octobre matin, ce qui signifie que le courant sera coupé 7 heures et demie par jour pendant ces deux jours.
Mais ce n’est que le dernier épisode en date de plusieurs semaines de coupures de courant auxquelles les Sud-Africains ont été exposés, organisées en fonction de la capacité d’approvisionnement d’Eskom, qui produit 90 % de l’électricité du pays et est l’un des plus grands émetteurs de dioxyde de soufre au monde.
Les programmes de délestage vont du stade 1, où l’électricité est coupée moins de 2 heures et demie par jour, au stade 8, où l’électricité n’est allumée qu’un peu plus de 12 heures par jour.
Eskom a appliqué le stade 6 à la mi-septembre, mais les stades 3 ou 4 ont été la norme ces dernières semaines.
Pannes, centrales mises hors service pour maintenance, sabotage, réapprovisionnement des barrages de réserve d’urgence, contraintes des fournisseurs de diesel, contamination de l’eau déminéralisée après l’ouverture d’une mauvaise vanne… les justifications des coupures de courant peuvent être nombreuses mais toujours est-il que l’approvisionnement a été constamment restreint depuis le début du mois de septembre. Une situation similaire à celle du mois de juillet.
Au 19 septembre, le pays a connu 1 637 heures de délestage national en 2022, soit 68 jours sans électricité en cumulé selon EskomSePush, une application mobile qui informe les utilisateurs des délestages pour éviter de se retrouver dans le noir. C’est déjà 42 % de plus qu’en 2021.
Les épisodes de délestage n’ont cessé d’augmenter depuis 2018, affectant considérablement la vie quotidienne de nombreux Sud-Africains et des entreprises notamment.
La production d’électricité en Afrique du Sud, provenant principalement du charbon puisqu’il fournit 77 % des besoins en énergie primaire du pays, est à la baisse depuis 2008, la demande dépassant l’offre de manière chronique. Le pays produit ainsi désormais moins de 20 000 gigawattheures par mois, alors qu’il produisait près de 22 000 GWh par mois en 2011.
De janvier à juillet 2022, le pays a produit 3 % d’électricité en moins par rapport à 2021. Et les coupures de courant récurrentes ont de nombreuses conséquences.
Le produit intérieur brut de l’Afrique du Sud a diminué de 0,7 % au deuxième trimestre de 2022 après avoir renoué avec la croissance pendant six mois. Statistics South Africa explique que les inondations dans l’État du KwaZulu-Natal et les délestages « ont contribué à ce déclin, affaiblissant une économie nationale déjà fragile qui venait tout juste de retrouver son niveau d’avant la pandémie. »
L’économie du pays a en effet été fortement touchée par la pandémie de COVID-19, ainsi que par les émeutes qui ont éclaté en 2021, une année au cours de laquelle le chômage a atteint des niveaux record. Avec les délestages qui devraient s’intensifier, l’économie sud-africaine pourrait encore en pâtir.
Eskom a beau donner des conseils lorsque les personnes sont confrontées à des coupures de courant, comme avoir une lampe de poche, un téléphone portable rechargé, faire des sauvegardes régulières de ses données, débrancher les appareils électriques et avoir un dispositif de protection contre les surtensions, la principale cause de dommages aux équipements. Cependant, sa gestion a été remise en question par des parlementaires qui ont appelé à un changement de direction d’Eskom qui ne parvient pas à répondre à la demande en électricité, même si les dirigeants furent souvent remplacés ces dix dernières années sans grand effet.
Le ministre des entreprises publiques, Pravin Gordhan, a annoncé en septembre des changements au sein du conseil d’administration, mais le nouveau président du conseil, Mpho Makwana, souhaite, pour le moment, maintenir l’équipe de direction actuelle et le PDG André de Ruyter.
Le ministre Gordhan a fixé l’objectif à atteindre : L’infrastructure doit être opérationnelle 75 % du temps, contre 60 % actuellement. Le nouveau conseil d’administration dit avoir besoin de deux mois pour trouver un plan d’action et lancer une évaluation des performances de ses centrales électriques afin de trouver les causes profondes du problème.
Le président Cyril Ramaphosa a écourté son voyage à l’étranger en septembre, après les funérailles de la reine Élisabeth II, en raison de la crise énergétique que traverse actuellement le pays. En juillet, il avait déclaré que les entreprises auront le droit de produire leur propre électricité sans avoir besoin de licence pour subvenir à leurs besoins et aussi vendre le surplus. Eskom a également acheté de l’électricité à l’étranger pour soulager les problèmes, mais la situation reste précaire.
La disponibilité des réseaux mobiles est également menacée par les délestages, car les batteries des tours de téléphonie se déchargent. Les entreprises de télécommunications doivent donc dépenser de l’argent en carburant pour faire fonctionner les générateurs. Dans le même temps, les vols de batteries, de générateurs, ainsi que les cambriolages sont en augmentation comme rapportés par News24.
AgriSA, une importante fédération agricole d’Afrique du Sud, a notamment contacté Eskom le 22 septembre pour lui demander des précisions sur les perspectives de fin d’année, inquiète des conséquences des délestages sur la sécurité alimentaire alors que l’Afrique du Sud entre dans la saison de plantation des cultures et que les agriculteurs utilisent l’électricité pour gérer leurs systèmes d’irrigation par exemple.
Les coupures de courant suscitent également des inquiétudes sur la préservation de la chaîne du froid pour la nourriture.
Certaines municipalités et gouvernements locales ont élaboré des plans d’urgence pour éviter les problèmes liés à leurs systèmes de gestion de l’eau et des eaux usées.
Car en plus de la panne d’électricité, les Sud-Africains pourraient également devoir se passer d’eau en raison des problèmes de gestion de l’eau qui pointent le bout de leur nez. La ville de Johannesburg a déjà demandé de limiter la consommation d’eau, les réservoirs étant déjà à des niveaux bas. En Afrique du Sud, l’été ne commence qu’en décembre.