L’Uruguay a décidé de prendre ses distances avec le Mercosur en négociant directement avec des pays tiers, accentuant ainsi le désaccord avec l’Argentine sur la stratégie des tarifs douaniers communs.
Le 7 juillet, l’Uruguay a annoncé qu’il commencerait à négocier indépendamment avec des pays extérieurs au Mercosur, en dépit d’une résolution datant 2000 stipulant que ses membres doivent négocier conjointement des accords tarifaires internationaux.
Le ministre uruguayen des affaires étrangères justifie cette décision en défendant « la modernisation du bloc, par le biais d’un agenda de négociations extérieures substantiel, agile, dynamique, flexible et permanent ». Le pays souhaite réduire les tarifs extérieurs communs afin de faciliter les échanges avec les pays en dehors du Mercosur.
Toute réduction tarifaire de droit à l’entrée nécessitent un accord unanime des États membres de l’Union. Mais l’Argentine n’approuve pas les revendications de l’Uruguay et souhaite maintenir des droits de douane plus élevés pour protéger son économie.
Le Mercosur, ou Marché Commun du Sud en espagnol, est un accord commercial sud-américain mis en place en 1991. Il établit un marché intérieur de libre-échange et donne une voix commune plus forte pour négocier avec les parties extérieures. Les membres fondateurs sont l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay. L’adhésion du Venezuela a été suspendue en 2017 et plusieurs autres pays d’Amérique latine, dont le Chili et la Colombie, sont associés au Mercosur sans en être membres.
La Bolivie, membre associé et en cours d’adhésion au Mercosur, a déclaré qu’elle négocierait également indépendamment du périmètre du Mercosur.
L’Uruguay plaide depuis longtemps en faveur d’une plus grande flexibilité afin d’ouvrir son pays au commerce international. Toutefois, il n’a reçu que peu d’écho jusqu’à présent.
Le Brésil, quant à lui, s’est montré plus enclin à ouvrir les portes depuis peu. En mars, il a proposé de réduire les taxes d’importation, estimant qu’elles étaient dépassés – elles n’ont pas changé depuis 1995 – et de les adapter aux normes actuelles. Cette proposition n’a pas été approuvée à l’unanimité. Cependant, l’Argentine, qui a stoppé les exportations de bœuf pendant un mois pour limiter l’inflation des prix des denrées alimentaires, se retrouve plus isolée.
L’Uruguay revendique toujours son appartenance au Mercosur
L’économie uruguayenne est relativement plus stable que celle de sa voisine argentine, qui est confrontée à une inflation vertigineuse et à un surendettement. Dans le passé, l’Uruguay a souffert de ses liens étroits avec les économies argentine et brésilienne, qui ont vacillé au début des années 2000.
Pendant cette crise, les Argentins ont retiré environ un tiers des dépôts de l’Uruguay des comptes bancaires qu’ils avaient ouverts dans ce qui était souvent appelé la Suisse de l’Amérique du Sud. Après une crise bancaire en 2002, l’Uruguay s’est redressé grâce à 15 années de croissance ininterrompue, une première pour le pays.
Au début du mois de mars, à l’occasion du 30ème anniversaire de la création du Mercosur, le désaccord entre l’Argentine et l’Uruguay s’est aggravé. Le président de l’Uruguay, Luis Pacalle Pou, a déclaré que le Mercosur ne devait pas être un « ballast » ou un « corset » qui empêche le pays d’avancer. Le président argentin, Alberto Fernández, a répondu que « si nous sommes un ballast, prenez un autre bateau ».
En avril, l’Uruguay a avancé la possibilité – non approuvée – de négocier directement avec les pays tiers. Il n’a cependant pas demandé l’abrogation de l’obligation du consensus commun au sein de l’Union.
La résolution 32⁄00, signée en 2000, mentionne que les membres doivent « négocier conjointement des accords de nature commerciale avec des pays tiers » et qu’un membre « ne peut pas signer des accords préférentiels qui n’ont pas été négociés par le Mercosur ». En ce qui concerne la résolution, l’Uruguay considère que la clause 32⁄00 « n’est pas en vigueur, puisqu’elle n’a jamais été internalisée ».
Néanmoins, Montevideo, qui accueille le siège du bloc commercial, affirme rester un membre à part entière du Mercosur.
L’annonce a été faite la veille d’un sommet virtuel entre les présidents, marquant la fin de la présidence semestrielle de l’Argentine au sein du Mercosur. La direction sera transférée au Brésil.