Google annonce des frais supplémentaires pour les publicités diffusées en France et en Espagne

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2 mars 2021

Google a annoncé aux annonceurs qu’ils devraient payer un supplément pour les publicités diffusées en France ou en Espagne. Cette décision est une réaction aux réglementations qui taxent les revenus des géants de la tech.

Google
© Solen Feyissa

Le 2 mars, Google a envoyé un email aux utilisateurs de Google Ads indiquant qu’ils verraient une taxe de 2 % sur leurs factures à partir du 1er mai 2021. Cette mesure s’applique aux publicités diffusées sur les adresses IP françaises et espagnoles achetées via Google Ads.

L’entreprise appelle cela un « coût d’exploitation réglementaire » et le justifie par les taxes sur les services numériques appliquées en France et en Espagne.

Ces taxes, également appelées « taxe Google » en Espagne et « taxe GAFA » en France, collectent 3 % du chiffre d’affaires réalisé par les grandes entreprises technologiques auprès des utilisateurs français et espagnols. Les recettes générées par la publicité numérique ciblée, la vente de données publicitaires ou les plateformes qui agissent comme intermédiaires numériques dans la vente de produits ou de services seraient soumises à cette taxe.

Cette loi a été adoptée afin de compenser les impôts que des entreprises telles que Google, Apple, Facebook ou Amazon évitent de payer. Les entreprises plus traditionnelles paient 14 points de pourcentage d’impôts de plus que les GAFA dans l’Union européenne.

Email de Google
Capture d’écran de l’e-mail de Google expliquant la taxe de 2 % sur les factures Google Ads

Les deux pays ont adopté ces lois en 2019 après que le projet d’une politique fiscale internationale discutée par les membres de l’OCDE fut arrivée à une impasse. L’Union européenne avait déjà discuté d’un tel projet, mais la Suède, la Finlande, le Danemark et l’Irlande l’ont rejeté.

La France a donc décidé d’aller de l’avant avec sa propre réglementation nationale. Le gouvernement espagnol a suivi peu de temps après. L’Allemagne a elle fait marche arrière, par crainte des représailles contre son industrie automobile.

En 2019, les autorités françaises ont estimé que le projet pourrait rapporter 500 millions d’euros par an.

Lutte commerciale avec les États-Unis

La plupart des entreprises touchées par les mesures fiscales sont américaines ce qui a eu pour conséquence de déclencher une bataille commerciale avec les États-Unis.

L’administration américaine a décidé d’augmenter de 25 % les taxes douanières sur des produits totalisant un marché de 1,3 milliard de dollars, tels que les sacs à main ou les cosmétiques, frappant ainsi certains des exportateurs français les plus dynamiques.

Des droits de douane sur les vins et spiritueux ont également été évoqués, mais ont finalement été retirés. Les États-Unis avaient déjà augmenté les droits de douane de l’UE dans le cadre du différend entre Airbus et Boeing mans la mesure s’était avérée également préjudiciable pour les détaillants américains de vins et spiritueux.

En raison de la pandémie de Covid-19, les deux parties ont fait une trêve au début de l’année 2020 afin de trouver un accord par l’intermédiaire de l’OCDE.

En octobre 2020, le ministre français des finances, Bruno Le Maire, a déclaré qu’un tel accord n’avait pas été trouvé et que l’État collecterait la taxe pour l’ensemble de l’année 2020.

Du côté américain, les droits de douane devaient entrer en vigueur le 6 janvier 2021. Toutefois, ils ont annoncé que le système était suspendu pour une durée indéterminée. Le représentant américain au commerce évaluera un cadre tarifaire plus large.

Cette pause permettrait en fait de poursuivre les investigations sur d’autres taxes sur les géants de la tech qui sont appliqués dans dix autres pays tels que l’Inde, l’Italie, la Grande-Bretagne ou l’Italie.

Des frais différents selon les réglementations nationales

Google et Amazon ont prévenu qu’une telle législation affecterait leurs clients en bout de chaîne. Les géants de la tech ont menacé de transférer le coût aux consommateurs.

Peu après l’adoption de la loi française, Amazon a voulu transférer l’intégralité de la taxe à ses clients pour toute transaction effectuée sur Amazon.fr.

Et Google a donc annoncé que les annonceurs paieraient les deux tiers de ce que la législation impose pour l’utilisation de son service Google Ads. Cette taxe sera appliquée à toutes les publicités diffusées en France et en Espagne, et pourra également être facturée aux annonceurs effectuant des transactions à partir d’autres pays.

Des frais similaires ont été appliqués par Google en novembre au Royaume-Uni, en Turquie ou en Autriche pour leur taxation sur le numérique. Les frais ajoutés sont de 5 % pour l’Autriche et la Turquie, et de 2 % pour le Royaume-Uni.

Google Ads permet d’acheter certains formats publicitaires visibles sur les résultats de recherche de Google, qui représentent 61 % du chiffre d’affaires total de Google, sur Youtube ou sur d’autres sites internet, y compris les sites d’information. Moyennant des frais d’intermédiation, la plupart des éditeurs qui vendent des publicités sur leurs plateformes mettent leur inventaire à disposition sur la place de marché leader du secteur : Google AdX.

Google et Facebook acceptent parfois de payer

Depuis 2010, la France a tenté à plusieurs reprises de faire payer plus d’impôts à Google, dont le siège social européen est basé en Irlande, où la fiscalité est plus avantageuse.

L’Espagne avait également imposé à Google de reverser aux médias une partie de leurs revenus publicitaires en 2014. L’entreprise californienne avait alors décidé de retirer son produit Google News d’Espagne.

Pourtant, en 2021, Google a accepté de payer les éditeurs français et australiens en vertu des lois sur le droit d’auteur.

Google avait d’abord menacé l’Australie de retirer tous ses services du pays.

Microsoft s’en est mêlé et a déclaré qu’il était prêt à offrir une alternative. Microsoft voit dans les lois gouvernementales une opportunité de réduire la part de marché de Google sur les moteurs de recherche qui atteint 91 %. Cela libérerait de l’espace pour Bing, le moteur de recherche de Microsoft.

Facebook avait de son côté d’abord supprimé tous les contenus d’actualité sur sa plateforme en Australie pendant quelques jours avant d’accepter de se conformer au Code de négociation obligatoire des médias d’information et des plateformes numériques. Il investira 1 milliard de dollars dans le soutien aux organismes de presse australiens au cours des trois prochaines années.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.