La perte de productivité, premier facteur de coûts liés aux addictions en Australie selon un rapport

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22 novembre 2022

Un rapport montre que les pertes de productivité en Australie représentent près de la moitié des 80 milliards de dollars australiens que les addictions coûtent au pays, devant les coûts des forces de l’ordre et des soins de santé.

cigarette
© Ralf Kunze

Selon une étude, les addictions aux drogues, à l’alcool, au tabac et aux jeux d’argent ont coûté 80 milliards de dollars australiens (34 milliards d’euros) à l’Australie en 2021. Près de la moitié de cette somme est due à des pertes de productivité. Par ailleurs, un Australien sur quatre devra faire face à une addiction au cours de sa vie.

L’étude a été publiée par Rethink Addiction, une coalition d’organisations plaidant pour un changement d’attitude et de réponse de l’Australie face à la dépendance, et réalisée par KPMG.

« L’Australie a l’un des taux les plus élevés au monde en ce qui concerne le fardeau sanitaire lié aux addictions », prévient l’étude dans son avant-propos, mais il n’y avait jusqu’alors que peu d’études sur ses coûts pour la communauté australienne. Le rapport a donc examiné 60 études existantes sur la dépendance et en a calculé ses coûts.

Il en résulte que la dépendance au tabac coûte le plus cher à l’Australie, avec 36 milliards de dollars australiens (23 milliards d’euros), suivie par l’addiction à l’alcool, avec 22 milliards de dollars australiens. Les autres drogues représentent 16 % des coûts et les jeux d’argent 13 %.

Ces 80 milliards de dollars de coûts tangibles sont associés aux pertes de productivité sur le lieu de travail et dans les foyers, à la consommation excessive et nocive des substances et services, aux soins de santé, à la justice et aux forces de l’ordre, aux services sociaux et autres.

Les pertes de productivité sur le lieu de travail sont par exemple le résultat de l’absentéisme et d’une plus faible intégration dans le marché du travail. La productivité des ménages est liée à la perte de production due à la mortalité prématurée ou à la maladie, aux coûts économiques des dépenses qui en incombent, à la perte d’emploi, aux coûts du temps passé avec les patients, au soutien apporté par la famille, etc. Le coût d’une consommation nocive correspond aux ressources utilisées pour l’achat de substances ou de services qui impliquent ou permettent la consommation.

Même si les auteurs de ce rapport reconnaissent que chaque consommation ne crée pas de problèmes et admettent qu’il peut y avoir des avantages tangibles et intangibles associés à cette consommation, l’étude se concentre en revanche exclusivement sur le coût des addictions et ne tient pas compte des avantages de la consommation, excluant également les gains issus de l’activité économique ou des recettes fiscales issus d’une consommation nocive par exemple.

Comprendre le coût de l’addiction pour donner l’occasion d’agir

Les coûts des addictions pour l’économie australienne sont constitués en grande partie (48 %) de pertes de productivité sur le lieu de travail et dans les foyers. Les coûts liés au tabac sont par exemple à 70 % dus à ces pertes de productivité.

Ensuite, la consommation nocive en elle-même des substances ou des services a contribué à 21 % des coûts (c’est l’achat du paquet de cigarettes par exemple). Les coûts liés à l’application de la loi et à la justice représentent 16 % du total et les coûts des soins de santé 10 %.

L’organisation, qui considère que la dépendance n’est pas un choix et préconise de réduire la stigmatisation des addictions, souligne que l’on ne dépense pas autant d’argent pour aider les personnes que pour lutter contre le trafic. L’alcool, dont la consommation est légale, était la drogue la plus couramment enregistrée dans les données sur les hospitalisations liées aux drogues sur cinq ans jusqu’en 2019–2020, représentant plus de la moitié (53 %) des hospitalisations liées à la drogue en 2019–2020.

Rethink addiction affirme qu’environ un demi-million d’Australiens ne peuvent pas accéder aux traitements dont ils ont besoin en raison de l’impact de la stigmatisation, des ressources limitées et des temps d’attente excessifs pour le traitement des addictions dans le système de santé publique.

En raison de la stigmatisation des addictions et de l’idée reçue qu’elles ne peuvent pas être traitées, les personnes attendent trop longtemps avant de chercher de l’aide, car le délai médian avant le premier traitement pour une personne souffrant d’une dépendance à l’alcool est de 18 ans.

Le rapport met également en exergue que, selon une étude réalisée en 2009, un Australien sur quatre sera confronté à un problème de dépendance lié à l’alcool, au tabac, à d’autres drogues ou aux jeux d’argent au cours de sa vie. Actuellement, une personne sur dix fume en Australie, un chiffre pourtant inférieur à celui de certains pays.

Bien que les autorités australiennes aient pris des mesures contre le tabagisme, celui-ci reste la principale cause de décès et de maladies évitables en Australie. On estime que 20 500 Australiens sont morts à cause de maladies liées au tabagisme en 2018, ce qui représente 13 % du total des décès. La population adulte aborigène est plus exposée à ces maladies car 43 % des adultes fument tandis que 15 % des adultes des communautés non autochtones le font.

Les Australiens ont également dépensé 225 milliards de dollars australiens en jeux d’argent en 2018–2019, soit le montant le plus élevé au monde par habitant. Logiquement, elle enregistre les plus grandes pertes de jeu par habitant avec 1 277 dollars australiens (825 euros) par personne et par an, ce qui peut provoquer des détresses financières mais aussi des difficultés relationnelles et une mauvaise santé mentale menant parfois au suicide.

En plus de ces coûts tangibles, le rapport a également estimé les coûts intangibles appelés « valeur de la vie perdue ». Il s’agit du coût des maladies prématurées, de la réduction de la qualité de vie, de la douleur et de la souffrance de l’individu, de ses amis et de sa famille. Chaque vie perdue prématurément induit une perte de capacité de production et à des conséquences psychologiques.

Plus difficile à mesurer, la valeur des vies perdues se situe entre 48 et 174 milliards de dollars australiens en 2021 (31 à 112 milliards d’euros).

Mais aussi importants ces chiffres soient-ils, l’organisation affirme qu’ils sont donnés de manière conservative en raison de lacunes dans la base de données et qu’ils sont très probablement bien plus élevés.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.