L’Argentine supprime les aides pour l’électricité et le gaz à 10 % des ménages

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17 juin 2022

L’Argentine a annoncé des mesures pour lutter contre la hausse des prix de l’énergie. Les 10 % de ménages considérés comme ayant la plus grande capacité de payer ses factures ne seront plus protégés des fluctuations du marché, mais les économies réalisées sur les dépenses publiques resteront faibles.

Gabriela Cerruti, porte-parole du président d'Argentine, a annoncé la nouvelle structure des aides d'Etat pour les factures de gaz et d'électricité des foyers
Gabriela Cerruti, porte-parole du président d’Argentine, a annoncé la nouvelle structure des aides d’Etat pour les factures de gaz et d’électricité des foyers | 16 juin 2022, Presidencia de Argentina

Le gouvernement argentin a annoncé le 16 juin une série de mesures visant à contenir l’inflation des prix de l’énergie. Une nouvelle structure de son régime de subventions pour les factures d’électricité et de gaz exclura les 10 % de foyers considérés comme ayant le plus grand pouvoir d’achat.

Posséder un bateau de luxe ou trois voitures de moins de cinq ans rendra un ménage inéligible aux subventions énergie de l’État, qui diminueront progressivement d’ici à la fin de 2022.

Alors que 10 % des ménages ayant la « plus grande capacité de paiement » ne bénéficient d’aucune subvention pour leurs factures de gaz et d’électricité et sont soumis aux fluctuations des prix du marché, neuf ménages sur dix seront protégés contre une augmentation des prix de l’énergie, a déclaré Gabriela Cerruti, porte-parole de la présidence, lors d’une conférence de presse.

L’Argentine tente de réduire les dépenses publiques comme convenu dans l’accord avec la Fonds Monétaire International tout en limitant les effets sur les plus vulnérables. L’État couvre actuellement plus de 75 % des factures de gaz et d’électricité, et les ménages dont les revenus sont supérieurs au revenu médian reçoivent 60 % de ces subventions.

Les ménages argentins seront divisés en trois segments ayant des pouvoirs d’achat différents. Sont considérés comme ménages ayant le plus grand pouvoir d’achat ceux qui remplissent l’une des conditions suivantes :

  • Avoir un revenu mensuel net supérieur à 3,5 du panier de base total – soit le prix moyen du panier alimentaire de base incluant d’autres services ou biens essentiels comme des vêtements, le transport, l’éducation – pour un ménage de deux personnes. C’est l’équivalent de 333 410 pesos (2 579 dollars) par mois à ce jour.
  • Posséder trois voitures ou plus n’étant pas plus vieille de cinq ans
  • Posséder trois biens immobiliers ou plus
  • Posséder un avion ou un bateau de luxe ou plus
  • Détenir des parts d’une société à l’étranger

Les ménages qui répondent à l’un de ces critères verront leurs subventions diminuer progressivement, de sorte qu’ils paieront la totalité des factures à la fin de 2022.

Le groupe aux revenus les plus faibles verra ses factures d’énergie augmenter de 40 % au maximum du coefficient annuel de variation des salaires, l’indice national de l’augmentation des salaires. Ce groupe comprend par exemple ceux qui bénéficient de prix préférentiels pour l’énergie, comme les chômeurs ou les ménages dont le revenu net mensuel est inférieur à 91 080 pesos (705 dollars) à partir du 1er juin.

L’année dernière, la moyenne de l’augmentation des salaires était de 53,4 %. Cela signifie donc que les factures n’augmenteront pas de plus de 21,4 % cette année pour les foyers aux revenus les plus faibles.

Pour le dernier groupe, celui aux revenus moyens, l’augmentation des factures ne dépassera pas 80 % de l’augmentation moyenne des salaires. Cela signifie que les factures n’augmenteront pas de plus de 42,7 % pour l’année.

Par conséquent, ces deux groupes ne verront aucun changement dans la structure des aides aux factures énergétiques qu’ils recevront d’ici la fin de l’année.

Une mesure pour la justice social plus que pour améliorer les finances publiques

Cette mesure intervient dans le contexte d’une inflation galopante et d’un endettement élevé de l’Argentine.

De janvier à mai 2022, les prix ont augmenté de 29,3%, et de 60,7% en un an, dans le pays. Mais la modification des conditions pour recevoir une aide financière aux factures d’énergie a un impact limité sur la réduction des dépenses publiques. Elle ne représentera que 0,05% du produit intérieur brut, selon El Cronista. Les dépenses publiques proviennent essentiellement du financement des retraites.

Le gouvernement a également ajusté son budget avec un déficit de 2,5% prévu pour l’année 2022, conformément à l’accord de restructuration de la dette avec le Fonds monétaire international. Dans le cadre de cet accord, le déficit en 2023 devrait être de 1,9 % et de 0,9 % en 2024. Les changements budgétaires ont été approuvés par décret, le Congrès ayant voté contre.

Par ailleurs, en raison de la pénurie de diesel dans le pays, le secrétaire d’État à l’énergie, Darío Martínez, a également annoncé une augmentation de la part du biodiesel inclus dans le diesel afin de réduire les importations en augmentant la production dans les raffineries locales. Pendant les 60 prochains jours, le diesel contiendra 12,5 % de biodiesel au lieu des 10 % habituellement obligatoire, sauf pour les petits producteurs non exportateurs qui passeront à 7,5 % de biodiesel au lieu du mix obligatoire de 5 %. Cette mesure, également mise en œuvre par décret, devrait augmenter l’offre de diesel de 90 000 m³ par mois.

Le gouvernement a également déclaré qu’il serait plus vigilant sur la mise en oeuvre du gel des prix et a exclu de nouvelles restrictions sur l’achat de devises étrangères. Avec une inflation élevée et un peso qui ne cesse de perdre de sa valeur, de nombreux Argentins préfèrent posséder des devises étrangères. Le contrat pour une partie d’un gazoduc qui vise à améliorer la distribution et le commerce de l’énergie a également été annoncé.

Dans le cadre d’une mesure plus large de contrôle de l’inflation, la banque centrale a également augmenté ses taux d’intérêt.

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Clément Vérité

Clément est le rédacteur en chef et fondateur de Newsendip.

Il a démarré dans l'univers des médias en tant que correspondant à 16 ans pour un journal local après l'école et ne l'a jamais quitté depuis. Il a ensuite pu travailler pendant 7 ans au New York Times, notamment en tant que data analyst. Il est titulaire d'un Master en management en France et d'un Master of Arts au Royaume-Uni en stratégie marketing et communication internationale. Il a vécu en France, au Royaume-Uni et en Italie.